Correspondance de Thomas Lindet pendant la Constituante et la Législative (1789-1792)

CONSTITUANTE (8 OCTOBRE 1789) 5

point le temps de vous faire aucunes observations particulières, ni de répondre à la dernière lettre dont vous m'avez honoré, et que je reçois dans ce moment. Je comptais faire imprimer la lettre que je vous ai adressée (1); je m’étais pas inquiet de celui qui aurait pu se trouver compromis; la faction du clergé n’aurait pu se défendre contre la vérité; maïs les événements ont tout changé. Le clergé se trouve chargé de l’exécration publique et exposé aux plus grands dangers, et les meilleurs citoyens peuvent être punis pour l’habit qu’ils portent; en conséquence, je dois garder le silence et ne pas fournir un nouvel aliment à la discorde.

Je n’ai pas besoin de vous dire que, dans la position des affaires, il est impossible qu’on s'occupe des réclamations les plus justes. Vos mémoires attendront un temps plus calme, excepté ceux que le cours des questions à traiter pourra amener.

Il faut que nous prévoyions les cruelles suites des fêtes militaires des. gardes du corps (2), avec le régiment de Flandre. Ce régiment [avait] adopté le système national. Les gardes du corps ont [depuis] ajouté aux folies bacchiques des derniers jours de la semaine, des attaques et des imprudences bien malheureuses. Lundi dernier et mardi matin, dix ou douze ont expié leur faute et je n’ai pu découvrir encore ce que ceux de notre voisinage sont devenus. Les soixante districts de Paris envoyèrent chacun 500 hommes, et chaque détachement était suivi d’une escouade plus redoutable que les troupes régulières. C'était une foule de gens mal minés, mal vêtus, armés de bâtons ferrés, de piques, de croissants, de faux, de broches. La milice bourgeoise de Versailles avait mis 300 hommes sur pied et prévint la suite de la Cour qui

(1) Nous n’avons pas trouvé cette lettre.

(2) Sur les derniers jours de septembre et les premiers jours d'octobre, on peut consulter les documents publiés par Buchez et Roux, t. 111, septembre-octobre 1789. Le repas donné par les gardes du corps aux officiers de la garnison de Versailles est du 30 septembre.