Gentilshommes démocrates : le vicomte de Noailles, les deux La Rochefoucauld, Clermont-Tonnerre, le comte de Castellane, le comte de Virieu

LE VICOMTE DE NOAILLES 19

dinaire qui suivit; tous ces nobles, tous ces prêtres tendant les mains vers l'orateur, se précipitant à sa suite, pris en même temps du délire de l’immolation; véritables fondateurs, eux aussi, de l'égalité et par conséquent de la démocratie.

Noailles monta à l’assaut le premier. Ce fut sa fortune, c’est aussi sa gloire. Ses ancêtres avaient été les premiers seigneurs de leur pays; de ce jour, il en fut, lui, le premier gentilhomme démocrate.

Que s’il faut à certains sceptiques, inaptes à reconnaître dans autrui des désintéressements dont ils sont incapables, la preuve que l’action de Noailles fut impersonnelle, qu'ils se reportent à une discussion qui eut lieu quatre jours après son accomplissement. Le 8 août, Necker demande aux États de consentir un emprunt. Pour en diminuer le poids, chacun immole ce que l’on nomme « les grâces royales ». (pensions, traitements obscurs sur les fermes, sur les régies, sur les postes, sur les gouvernements de-province, etc.). Seul, peut-être, Noailles au milieu de ses pareils est en mesure de déclarer et déclare aux applaudissements de l’Assemblée :

Quant à la renonciation des bienfaits du roi, je ne puis parler que pour moi... J'ai refusé toute récompense au retour de la guerre d'Amérique; el lorsque j'ai été nommé député, j'ai renoncé à la survivance de commandant de la Guienne, parce que j'ai cru que les survivances étaient un mal (1).

Cela s’appelle conformer sa conduite à ses idées.

(1) Journal officiel du 8 au 9 août 1789.