Histoire de la théophilanthropie : étude historique et critique : suivi d'une notice sur les catholiques allemands

HISTOIRE DE LA THEOPHILANTHROPIE. 6

La Théophilanthropie, qui a rompu avec la grande tradition chrétienne, a-t-clle eu une telle personnalité ? À défaut d’un Jésus-Christ, a-t-elle eu du moins des Paul, des Jean, des Pierre ?

Certes, il y eut parmi ses fondateurs ou parmi ses membres, des hommes probes, honnêtes, comme Chemin, Hauy; des hommes dévoués au bien public, comme Dupont de Nemours ou Lareveillère Lépeaux, qui étaient de vrais sages, des philosophes, qui surent préférer à l'éclat des honneurs l’obscurité d’une vie modeste, vouées aux recherches de la science et à la pratique de la vertu; des économistes, des savants, des écrivains illustres comme Bernardin de Saint-Picrre ; mais ce qui frappe, le voici : Non-seulement il n’y a pas eu parmi eux de personnalité religieuse éminente, mais il n’y a pas eu, à notre connaissance, un seul Théophilanthrope qui ait fait dela propagation de l’idée Théophilanthropique son œuvre, l’œuvre de sa vie, et qui ait acquis quelque célébrité uniquement par le dévouement, le zèle qu'il aurait apportés à cette œuvre.

Non: il n’y à pas eu parmi eux un seul véritable apôtre, j’entends un de ces hommes animés de ce zèle ardent, dévorant, qui faisait dire à Paul : « Malheur à moi si je n’évangélise (1)! » qui ne lui laissait en effet d'autre préoccupation que celle de prêcher l'Évangile, et lui faisait braver, pour le répandre, la fatigue, le péril, la souffrance, l'exil, la prison et la mort.

Non-seulement il ne s'est pas trouvé de tels hommes parmi les fondateurs, mais les personnalités les plus éminentes parmi eux ont eu un caractère plutôt politique que religieux. Circonstance fâcheuse, au point de vue de l'institution qu’ils voulaient fonder ! la plupart des Théophilanthropes étaient connus comme ayant joué un rôle actif pendant la révolution. Tous, ou presque tous, avaient été des révolutionnaires décidés.

De là plusieurs conséquences : D'abord l'institution risquait de partager, et elle partagea en effet le sort du parti politique dont Popinion générale la faisait solidaire; en second lieu, à peine née, elle fut accusée hautement de n'être qu’un instrument

(D) -Coxinthiens, chap, IX, v. 16.