Histoire des deux conspirations du général Malet

46 HISTOIRE DES DEUX CONSPIRATIONS

intelligences dans l’armée. Il n’ignorait pas que le sentiment républicain y avait laissé de profondes racines. Oui, malgré les distinctions etles richesses prodiguées à l’armée, nombre d’officiers frémissaient de honte et de douleur à la pensée qu’ils étaient devenus les soldats de Bonaparte après avoir été les soldats de la patrie. Retenus par la discipline, ils gémissaient tout bas de voir confisquer au profit d'un général sans conscience et sans foi, arrivé au trône par un crime inouï, le sang le plus pur et les trésors de la nation, et ils rongeaient impatiemment leur frein.

J'ai raconté, dans l’Æisioire de la République française la ferveur patriotique et l’enthousiasme des armées du Rhin et d'Italie aux anniversaires des grands jours de la Révolution. Les soldats d’'Italie avaient été les premiers envahis par l'esprit de démoralisation. Et quoi d'étonnant? N’avaient-ils

pas subi la pression dissolvante d’un chef qui, pour exciter leur courage, n’avait rien trouvé de mieux que de leur montrer, comme une proie à partager, la riche contrée où ils devaient combattre et écraser l'Autriche ?

Mais à l’armée du Rhin, où avaient commandé Jourdan, Hoche et Marceau, le sentiment républicain s'était conservé longtemps dans toute sa pureté!