La Révolution française (1789-1815)

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Organisant la rétrogradation, il en vint à la mascarade sanguinaire du culte de l'Etre suprême où la théologie s'imposait par la guillotine au lieu du bûcher. Poussé par la sifuation même où l'avait placé son ambition purement personnelle, il ouvrit, au sein même du Comité de salut public, une crise gouvernementale où il suecomba enfin, trop tard pour la Patrie et l'Humanité.

Mais cette chute nécessaire eut de graves conséquences. Le gouvernement révolutionnaire, dû à un empirisme supérieur et non à une conception rationnelle et systématique, fut compromis. Sa puissance fut énervée et les royalistes purent se livrer impunément aux plus odieux excès. Triste suite de l'élimination de Danton de l'appareil gouvernemental, dont seul il pouvait d'abord assurer le complet fonctionnement |

Mais il ne faut pas considérer Danton d'une manière isolée. La loi d'évolution prescrit la continuité et la Révolution française, quand elle est scientifiquement comprise, ne fait qu'accomplir les destinées mêmes de la France, conçues dans leur essence fondamentale et dans leurs phases successives. M. de Carné a dit que Louis XIV aurait signé les décrets de la Constituante : j'ajoute que Louis XI et Richelieu auraient accepté la Convention.

Comme Louis XI, Henri IV et Richelieu, Danton voulait une France une, forte et homogène, sous l’action d'un gouvernement énergique, puissant ef vraiment organique. Comme eux, il pensait que c'était là une condition de l’action de la Patrie pour le service de l'Humanité.

Comme eux et mieux qu'eux, grâce à l'incomparable dix-huitième siècle, il rendait prépondérante la notion de patrie, au-dessus des passagères dissidences théologiques. Ce qu'Henri IV n'avait fait qu'ébaucher par l'édit de Nantes, il voulut le réaliser. Il conçut implicitement la grande formule : réorganiser sans dieu ni roi; ce qui veut dire que tous les hommes doivent, en France, être associés au service de la patrie, qu'ils soient catholiques, protestants, juifs, déistes, athées ou indifférents. La théologie n'est plus que d'ordre privé. La politique supérieure de la France exige que nous y associons les bouddhistes et les islamistes. — Plus heureux que Danton, nous pouvons, par une sage théorie historique,