La révolution française à Genève : tableau historique et politique de la conduite de la France envers les Genevois, depuis le mois d'octobre 1792, au mois de juillet 1795

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qu’il n'avait point quitté la République, on lui ré pondit froidement que s’il n’était pas émigré, il aurait dû l'être. C’eft ainf enfin que les Juges du Syndic Cayla eurent l’impudeur de placer à la tête de fes ac-

cufations, les immenfes aumûnes que ce vertueux Ma _ giftrat avait fait diftribuer de tout temps à la claffe des pauvres, dans l'intention, lui imputait-on, de la corrompre, Il n'eft que trop vrai qu’il avait mal placé fes bienfaits, puifqu’il les avait verfés fans relâche fur la claffe même qui a demandé à grands cris fa mort, & qui l’a obtenue. Elle femble £ la reprocher aujourd’hui; mais il à fallu un événement étranger & inattendu, pour la forcer à ce prompt retour fur elle-même.

Vous vous rappelez, Monfeur, que la fubverfion du 18 Juillet avait été, finon méditée, du moins exécutée par les clubs des Marfeillois & des Montagnards: Ces Clubs, compofés de la dernière clafñe de notre peuple, & où étaient admis beaucoup d’étrangers, ne pouvaient être que les grenadiers, & non les directeurs d’une pareille fubverfon. Auf, dès qu’elle eut été accomplie, les principaux membres du Gouvernement fe hatèrent-ils de s’y affocier ouvertement, foit pour y échapper, foit pour en conferver les pillages, ou en recueillir les fruits, foit enfin pour en arracher les rênes au Réfident de France: ilen était temps; car celui-ci, en excitant les montagnards, s'était flatté de les gouverner exclufivement, & par leur moyen d’amener la petite République à demander fa réunion à la grande,