La Serbie

les mêmes méthodes. Nos lecteurs se souviendront de la doctrine professée naguère par Andrassy fils sur les annexions « nécessaires », doctrine dont nous avons parlé dans un de nos derniers numéros. Andrassy y établissait une distinction entre les annexions dites politiques et que l'on fait dans un but de domination et celles dites stratégiques que l’on fait dans un but de « conservation ». Andrassy concluait que ces dernières n'ont rien d'impérialiste ! C'est ainsi qu'il justifiait toutes les annexions et conquêtes autrichiennes d'avant la guerre. Pour nous autres qui avec le Président Wilson reconnaissons Île principe d’auto-disposition des peuples, nous considérons toutes les annexions contraires à ce principe comme illégitimes quel que soit leur but. Selon nous, il n’y a de légitime que ce qui est juste et il n’y a point de justice dans l'oppression. Les ltaliens évoquent à présent contre les Sudslaves Îles mêmes raisons dont se prévalaient naguère leurs oppresseurs (raisons de nécessité stratégique et de droit historique), pour justifier l'occupation du liltoral adriatique, habité par des Sudslaves, Bref, ils traitent ces derniers en ennemis contre lesquels on fera bien de s'assurer et de prendre des garanties ! Comment expliquer ce phénomène étrange ?

Il faut pourtant reconnaître que tout le monde en Italie n'approuve pas cette politique. Un groupe d'intellectuels, peu nombreux mais forts, par la sincérité de leur conviction et leur foi — se sont opposé dès le début à l’impérialisme déguisé de la nouvelle Italie. [ls comprirent que ce n'est pas bien servir le pays que de lui faire des ennemis là où il aurait pu compter des amis. [ls conjuraient les dirigeants de Rome de ne pas créer au-delà de l’Adriatique une nouvelle Carthage. On ne les écouta pas. En même lemps que la guerre contre l’Autriche-Hongrie, on mena une campagne absurde contre les nationalités opprimées de la Monarchie. On accusa les Yougoslaves d’être vendus à l'Autriche, on calomnia tout le monde jusqu'au directeur de « La Serbie » qui fut-assez malmené par la presse chauvine en Italie. Cette politique fut une des causes du désastre de Caporetto. Alors on changea de tactique et l’on arrangea le congrès de Rome et les brillantes manifestations de Campidoglio. M. Orlando s’expliqua en cette occurence sur le véritable sens du pacte de Londres dont l'exécution intégrale ne devait pas être selon lui exigé dans le cas du démembrement de l'Autriche. Le résultat ne se fit pas attendre. Ce fut la victoire de la Piave, gagnée en partie avec le concours des Slaves d'Autriche. En effet, ce furent ces derniers qui fournissaient des renseignements sur des positions et des mouvements de l'armée autrichienne. Une division tchèque combattait même dans les rangs des Italiens. Et après que cette politique eut porté ses fruits, les dirigeants italiens profitant du délire patriotique où se trouve leur pays, le Ed ee mt [+ * vers la

_ZHRMAEURS Due GANG PS Sn ee — SERBIE

La Hongrie suppliante el menaçante

SR Te

conquête des territoires sudslaves au mépris du principe des nationalités. Or, on ne peut pas se réclamer de cerlains principes et en même temps travailler contre eux. Et qu’on ne nous dise pas que c'est en vertu du principe des nationalifés que les Italiens ont occupé Fiume, Abazzia et d'au tres localités yougoslaves.

Tout le monde se rappelle de quelle façon lors de l’entrevue du marquis de San Giuliano avec le comte Aerenthal, le maire d'Abazzia salua les deux Excellences de la Triplice. Fût-ce en italien, en allemand ou en magyar ?. Non, ce fut en serbo-croate. C'était la meilleure manière de leur montrer qu'en ce pays-là, ils n'étaient pas chez eux.

Si les Italiens désirent que leur drapeau soit honoré comme le symbole de la liberté qu'ils ne viennent pas le planter là où il pourrait symboliser la. violence et l'injifstice, TommaAsÉO.

Un second Éisours de M. Orlando

Pour répondre aux différents orateurs el à leurs critiques, le ministre-président italien a prononcé le 27 novembre, à la Chambre, un second discours qui par son manque de clarté voulu, exprime assez bien le caractère équivoque de la politique oflicielle italienne. D'un côté, M. Orlando défend le pacte de Londres, disant que des gens mal renseignés ont dénoncé ce pacte comme un document “l'impérialisme, mais qu'en réalité il ne l'est pas. Ce pacte FRE selon M. Orlando, une transaction.

Ainsi, par exemple, par ce traité l'Italie renoncait à des villes et à des territoires dont l'italianité

Il ya déjà assez longtemps qu’un journal magyar, en parlant de « La Serbie », la caractérisait comme le seul journal ententiste qui s’occupât de la question mägyare et qui le fit d’une façon approfondie. « Heureusement pour nous, ajoutait l’auteur de ce jugement, « La Serbie» est peu répandue et peu lue.» La première remarque du correspondant magyar reste vraie aujourd'hui encore, et c’est vraiment dommage, parce que les allaires hongroises prennent ur cours qui, en dehors de tout intérêt politique, mérite d'attirer l'attention générale par son originalité et sa bizarrerie.

Après-avoir vainement essayé de concilier les principes de Wilson avec la conservation de la Hongrie intégrale, les Karolyistes entonnent maintenant d'autres refrains. L'offre d'alliance faite à l’Entente

n'a produit aucun effet appréciable, mais cet échec ne décourage pas les Magyars qui risquent d’autres plans encore plus ingénieux. Une de leurs dernières propositions est motivée par leur désir de conserver au moins la Hongrie économique (voir la déclaration du comte Karolyi dans le « Berliner Tagblatt » du 25 novembre), avec le secret espoir que ceite Hongrie

ne peut être méconnue de personne». A cette allusion à Fiume, on entendit des eris: Vive | économique évoluerait un jour vers l'an< ! k Fiume! Pour- satisfaire cependant l'autre | &ienne Hongrie millénaire. Les nationalités

partie du parlement, celle qui recommande la modération, M. Orlando a terminé en disant que le pacte de Londres démontre bien que l'Italie ne méconnaît pas l'opportunité des transaciion$ tventuelles nécessaires. L'Italie maintient donc la pacte de Londres, mais d'autre part elle est disposée à échanger autant que cela lui paraît

non-magyares qui n'aiment pas ces subtibilités maintiennent leur point de vue simple et naturel, celui du droit de chaque vation de se réunir conformément au principe de nationalité à sa nation-sœur. Les par conséquent, n’ont qu'à se

nécessaire et opportun, les avantages garantis par ce pacte contre d'aulres bénéfices appréciables. Magyars, , La conférence à trois — France, Grande-Bre- | contenter d’une Magyarie composée des iagne, Italie — à Londres s'est probablement, districts purement magyars.

occupée de la question des rapports italo-sudslaves. Elle doit avoir examiné par quelles compensations la France et la Grande-Bretagne pourmir être formellement déliées d'un traité dont

poids pèse si lourdement sur le programme que allié.

La proclanation du royaume des Serbes Croates et Slovènes à Belgrade

Le 4 décembre a été solennellement proclamé à Belgrade le royaume des Serbes, Croates et Slovènes. La conférence entre 28 délégués du Conseil National de Zesiee et les représentants du royaume de Serbie a abouti à des résultats satisfaisants sous lous les rapporis. Dans une séance solennelle le prince héritier Alexandre, entouré de MM. Protitch, Yovanovitch, Rachich et Nintchitch, membres du gouvernement serbe, a déclaré vouloir accepter la régence du royaume des Serbes, Croatas et Slovènes que lui ont offerte les délégués autorisés de la nation.

Jusqu'à la convocation de la Constituante un avant-parlement remplira les fonctions de la représentation nationale. La Constituante sera convoquée au plus tard six mois après la conclusion de la paix. L'autonomie actuelle des provinces est maintenue.

Un ministère sudslave responsable devant la couronne et le parlement provisoire sera formé très prochainement.

Malgré l’insuccès évident de leur politique actuelle, les Karolyistes ne semblent pas vouloir désarmer. Ils prodiguent maintenant les cajoleries à l'adresse des nationalités, accompagnées de menaces à l'adresse des Alliés. Donnons quelques exemples de ce que les Magyars « républicains » disent aux uns et aux autres :

Le comte Karolyi, en sa qualité de Ministre-Président, a adressé le 24 novem-

bre (d’après le « Pester Lloyd » de ce jourlà) un manifeste dans lequel se trouve-une

interprétation étrange du droit des peuples de disposer de leur sort. « Hommes, femmes, s’écrie le comte Karolyi, aujourd’hui chaque peuple aura à décider lui-même dans son éépartement, dans son arrondissemeni et dans sa commune (et non pas dans son Etat à lui — N. d.1I.R.), quelle langue il apprendra à l’école, en ne Jangue il sera jugé devant les tribunaux. »

— « Femmes, à l’avenir vous aurez à dire,

Lundi 9 Décembre 1018 — No

vous aussi, votre mot dans la question de guerre ; vous déciderez aussi à qui appartiendra la terre. » Et ensuite : « C’esi en cela que consiste le droit d'aulo-disposition proclamé par Wilson. Mais le gouvernement de la République magyare va encore plus loin. Chaque paysan obtiendra au plus tôt un morceau de terre qu'il pourra cultiver avec sa famille pour vivre convenablement. »

Il serait trop long d'énumérer tous les

avantages que le comte Karolyi ofire aux nationalités non-magyares, avantages exposés par lui avec une verve demi-poétique, demi-théâtrale et qui a dû beaucoup égayer les peuples non-magyars habitués à voir les Magyars dans la peau du loup et non dans celle de l'agneau... Le clou de ce maätifeste est constitué par le passage final où le comie Karolyi invite les nationalités à rester en Hongrie à l'examen, c'est-àdire pendant un certain temps, pour voir si réellement ses promesses seront tenues. « Nous vous disons : avant que vous vous sépariez de votre ancienne patrie (sic), avant que vous renversiez l'ordre existant en Hongrie, essayez pourtant de vivre en accord avec le nouveau gouvernement hongrois. Si vous constatez que nous ne tenons pas nos promesses, vous avez toujours le temps de vous séparer de nous. Nous n'emploierons aucune force contre vous. »

C’est vraiment touchant, cet amour de la Hongrie nouvelle pour les nationalités ! Mais avant que les nationalités aient pu donner une réponse quelconque à cette invitation aimable, le comte Karolyi et son bras droit, Oskar Jaszi, ont lancé dans le « Vilag » du 26 novembre, un appel ins0lent aux Alliés en les invitant à chasser

: immédiatement les armées serbe, roumaine

et tchèque du territoire hongrois; si les Alliés n’obtempèrent pas, le comte Karolyi et Oskar Jaszi prendront une résolution terrible. i{s donneront leur démission ! « Et alors, conclut ce manifeste, ‘venez vous-même gouverner, général ! »

Voici donc les deux armes principales de la Hongrie « nouvelle » : la cajolerie et les menaces. Et les Magyars s’imaginent que nous allons pleurer le départ des Karolyisites? Mais pas du tout. Il nous est parfaitement indifférent que la Magyarie soit gouvernée par le beau-père Andrassy, ou par le gendre Karolyi, ou par tout autre représentant de l'oligarchie seigneuriale magyare. Une seule chose nous importe : voir tous nos frères de race définitivement affranchis du joug magyar. Tout le reste, ça nous est bien égal !

FEUILLETON

DOMMAGES ET PERTES DE LA SERBIE

(Suite.) 2) Dans la propriété d'Etat

Le stock des marchandises et des produits divers qui se trouvaient dans les magasins des douanes, des chemins de fer ou des jpioster, et que les particuliers n'ont pas eu le temps de transporter, ja également été pillé, d'où résulte pour l'Etat un dommage que nous évaluons à 12.000.000.

En outre, tous les articles faisant l'objet d'un monopole, tels que le sel, le tabac, Ce papier à 1 cigarettes, les allumettes, fe pétrole, les timbres et le papier timbré, qui 5€ trouvaient dans les magasins de l'Etat, ont &t6 emportés wo anéantis; cela près sente une valeur. de 16.000.000. ;

Le numéraire en caisse dans les bureaux et institutions était,

comme wn l'a vu, de 28.500.000. A la suite de la hâtive retraitty tout cet argent tal été anéanti ou est resté dans le pays «entrd les mains des fonctionnaires, Ces dernières Sommes ont été soit confisquées par les autorités militaines, soit dépensées par ceux qui en disposaient, de sorte qu’elles doivent être considkfrées comme perdues.

I faut également compter ici les Lee qua l'Etat subira sous la forme de pensions à servir aux, invalides de guerre, D'après leux nombre actuel et l'évaluation du ministère de la guerre, ils seront À la fin de la guerre au moins 76.000, En supposant que chacun ne reçoive qu'une rente anmuelle de 600 fr. et pendant dix ans seulement, l'Elat aura à payer de ce chef

46.800.000 par an, ce qui correspond à un Eapital de 400 pis lions de francs au taux de 6% () ;

L'Etat devra aussi prendre à sa charge les risques d'assurances contracctées par des familles dont les assurés ont été tués pendant la guerre et qui, tout en ayant acquis le droit au paiement de la police, lont &t6 empêchés par cas de fonce imaceure, de payer à temps la prime de guerre Ces risques repré sentent une somme de 18.000.000.

L'Etat a subi encore, en ce qui concerne le service de Kloi emprunt d'avant-guerre, des pertes qui, pour cinq années -de guerre, se montent ‘à 240.000.000.

Le total des pertes sübies par l'Etat représentent valeur de 714500.000 fr.

Les emprunts spéciaux afférents à la présente guerre, ainsi que l'eutretien des troupes, »1 ont pas été pris en considération, faute de données sur la durée de la guerre et sur le montant folnl qu'atteindront ces emprunis,

donc unel

3) Dans la propriété des corps autonomes

il faut aussi tenir compte des dommages subis par la municipalilé do Belgrade (anéantissement des parcs, du pavage, de la canalisation, de l'aqueduc ct de nombreux édifices), dommages représentant à peu près 5.000.000. Il faut encore y ajouter l'octroi perdu, ainsi que les revenus. de l'aqueduc, de la canalisation, de l'éclairage, qui n'ont pas été encaissés, tandis que la imunicipalités devait entretenir son personnel. Pendant cinq années| de guerre, ces pertes représentent 8.000.000. La municipalité de Belgraile a supporté encore, /dans le service de son emprunt de) 45.000.000 de francs, des pertes qui, pour cinq années ide

d) Nous n'avons jpas pris en considération les indemnités: et secours accordés aux familles des soldats pauvres.

guerre et au taux de 6 0%, représentent 9.000.000. L'ensemble des Pertes de la municipalité de Belgrade est donc ‘de 22.000.000.

Les dommages subis par d'autres municipalités et divers corps autonmep (teignent 14.000.000.

Au total, les pertes en äimarchandises, en numéraire et en objets de valeur ;subies par les particuliers, par l'Etat ef des corps autonomes et communaux représentent une valeur do 1962.500.000 de francs.

5. Installations de fabriques et ateliers divers 1) Dans la propriété privée

Nous avons vu que les installations de fabriques privées, avec leur capital roulant et leurs matières premières, représentent une valeur de 132500.000 de francs. Si l'on admet que les entreprises industrielles n'ont pas toutes été anéanties, mais que, sauf quelques-unes qui ont é6t6 brûlées, elles n'aient été que partiellement démolies et endommagées, si l'on ajoute les installations, les machines, les moteurs, les courroies dé transmission, etc. ainsi que les matières premières et tout cd qui a 6t6 emporté avec la perte occasionnée par manque de rendement du capital roulant, on arrive, d'après notre compte ‘spécial, à une valeur de 90.000.000. Nous devons y ajouter le montant des appointements payés par les entreprises industrielles à leur personnel pendant

cinq années de guerre, soit 20.000.000. : donc 110.000.000 de franes. . pertes totales atteignen

2) Dans la propriété d'Etai Les fabriques de l'Etat ont subi des dommages très impaLu LE fditices ont été démolis et les installations abimées; es lriques de tabac et d'allumettes ont été complètement brûlée. Nous évaluons ces dommages comme suit :

La fabrique de Institut mili taire technique à Kragoujeyat et la poudrerie ‘d'Obilitchevo, avec le niet de travail

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