Le Royaume de Monténégro : avec une carte

26 LE ROYAUME DE MONTÈNEGRO

la poitrine, se la frappant à coups de poing et s’égratignent la peau pour donner la preuve du chagrin qu'ils éprouvent. Le spectacle est plus grotesque qu'émouvant. Autrefois, à la mort d’un parent, hommes et femmes se coupaient les cheveux et se faisaient des entailles au visage, mais cette coutume a disparu.

L’enterrement se fait dans la campagne, n'importe où. Après avoir creusé un trou, on y dépose le cadavre, presque toujours sans cercueil et sans même s’être donné la peine de le déshabiller. Une pierre brute, sans aucune inscription, indique seule, aux initiés, la présence d’une tombe. Pour celui qui a trouvé la mort dans une escarmouche à la frontière, ou qui est tombé victime de quelque cause, la pierre a une plus grande dimension, mais ne porte non plus aucune épitaphe.

En général, la vie d'un homme ne compte pas. Si un Monténégrin est offensé, il répond immédiatement en tuant son insulteur d’un coup de revolver, et, dans ce cas, le meurtrier n’est jamais poursuivi. Mais si la vengeance est remise à plus tard, même au lendemain, l’offensé se voit dresser procès-verbal, par les autorités. Le voleur est plus sévèrement puni que l'assassin. Le vol, d’ailleurs très rare, est considéré comme un délit grave. Celui qui se rend coupable d’un larcin peu important ne passe pas en justice : on l’abandonne à ses compatriotes qui lui arrachent tous ses vêtements, puis lui administrent, sur la route, et devant une nombreuse assistance, une telle volée de coups de bâton que le patient finit par tomber en défaillance. Parfois aussi on l’étend sur une banquette où il est fouetté. Après le châtiment, il quitte le plus souvent le pays pour cacher sa honte.

Le « voleur de marque » est sûr d’être fusillé par ordre des autorités. Si l’un d’eux est pris en flagrant délit et tué, l'État récompense le meurtrier en lui versant une certaine somme.

Nombre de délits qui, dans nos pays, sont réprimés par la prison se règlent, au Monténégro, par la fusillade, fort employée aussi pour les crimes politiques. La police joue volontiers du revolver, quand un prisonnier fait mine de résister ou tente de s'esquiver. C’est par le revolver surtout que les policiers se font