Marie-Antoinette, Fersen et Barnave : leur correspondance

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de revenir. Mais il y a plus; Monsieur étant déchu, M. le comte d'Artois lui succède et il sera, à son tour, requis de rentrer dans le royaume. S'il laisse également expirer le délai, M. d'Orléans prend sa place: pour faire constater son droit il sort de France, mais il y rentre sur la réquisition, il y rentre avec toute la popularité formée de la haïne que se seront attirée les frères du Roi; il n’y aura plus que la personne du Roi entre lui et le trône. Ce résultat est certain et alors combien la situation n’aurait-elle pas empiré?

» La France recèle en ce moment un puissant instrument de guerre civile : plus de cent mille hommes de garde nationale ont été mis sur pied pour la défense des frontières. Cette troupe est facile à animer, à irriter dans tous les sens. Elle peut offrir une armée à la République ou à M. d'Orléans. Cette troupe sera licenciée dès le moment où l’on n'aura plus à craindre une invasion. Mais tant que les frontières seront menacées, tant que les princes seront hors du royaume, elle demeurera sur pied et sera le germe le plus dangereux d’une nouvelle révolution contre le Roi.

» Il est difficile de douter que certaines puissances étrangères ne contribuent à entretenir les troubles auxquels la France est livrée. Les princes qui par leur naissance ont des droits au trône, les particuliers qui possèdent en France leurs propriétés, les