Mémoires du général Baron Roch Godart (1792-1815)

250 MÉMOIRES DU GÉNÉRAL GODART

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Au quartier-général de Coblentz le 14 prairial (2 juin) L'an 3e de la République française une et indivisible Marceau, général de division commandant l'aile droite de l'armée. Au représentant du Peuple, Gillet, membre du comité de Salut Public.

« Je te fais passer, mon cher Gillet, une lettre de Poncet renfermant le travail de l'embrigadement du 6e et 8° Be du Pas-deCalais, 10° de Paris. Cela fera une assez bonne 1/2 Bde. Il ne lui manquera, comme à bien d’autres, que des hommes pour la compléter.

CESR. » « MARCEAU. » 1795 (Q, p. 34) L'armée pendant l'hiver de 1794-1795 aux bords du Rhin.

On peut s'étonner que Godart ne parle pas aussi des soulfrances de l'hiver précédent, le plus rude du siècle. L'année 1794 avait été une année de disette; la misère avait une autre cause dans ce pays foulé depuis trois ans par tant d’armées et tant de réquisitions arbitraires.

Le représentant Lacoste, devant Valenciennes, écrit à Gillet son collègue (30 vendémiaire, 21 octobre : « La conduite d’une partie des administrateurs militaires est effrayante. Voilà la source de nos maux. Il est temps de la tarir si on veut que la République prospère. »

Certains corps furent, dès le mois de brumaire (novembre), deux ou trois jours (Kléber, Jourdan), d'autres huit jours sans distribution de pain; et ce pain si rare était un mélange infect de pois et d'avoine. On y suppléait en mangeant de l'herbe. On logeait dans des trous creusés en terre.

L'armée souffrit de la famine et du plus complet dénuement, du manque de vêtements, peudant tout cet hiver où les voitures roulaient sur le Rhin glacé. Marceau, les représentants Talot et Joubert (21 ventôse, 12° mars), et Jourdan lui-même répétaient les griefs de l’armée contre les administrateurs. La misère était la même devant Luxembourg.

Quand la division Poncet fut envoyée auprès de Coblenz et de Bingen, elle partit sans pain, le 14 germinal (3 avril), marcha en