Oeuvres politiques de Fabre d'Églantine

SUR L’ALLOCATION D'UNE INDEMNITÉ 153

que pour leur famille, prolongent leur travail bien avant dans la nuit, que dès lors ils ne peuvent assister aux assemblées de sections; que les mal intentionnés; les aristocrates, s'y glissent pendant que le peuple travaille; et vous avez dû remarquer que ce n’a jamais êté que par l'absence des sans-culottes qu’on est parvenu quelquefois à égarer certaines sections. Lorsqu'on vous a dit que ce serait mal penser du patriotisme des citoyens, que de leur donner cette indemnité, on a commis une grande faute de raisonnement; car il faudrait dire aussi qu’on augure mal du patriotisme des fonctionnaires publics, à qui on paie une indemnité pour la perte qu'ils éprouvent par la cessation de leurs occupations habituelles, etc.; l’on voit que si l’on poussait plus loin ces conséquences, on arriverait à l’absurde. Il est évident que lorsque des mesures de salut public aussi urgentes, aussi généralement senties, vont être décrétées, elles ne peuvent être soutenues que par toute l'énergie du peuple. Si vous ôtez à l'artisan une partie du temps qu'il emploie au travail qui lui procure sa subsistance, vous devez l’indemniser de cette perte, autrement légalité serait rompue.

La dette des citoyens envers la société cesserait d'être la même ; elle serait plus grande pour le citoyen qui a moins besoin de la protection de la société, et qui en tire le moins d'avantages; le pauvre lui sacrifierait une partie de son existence, alors que le riche ne lui consacrerait qu’un infructueux loisir. L’indemnité qu’on vous propose est même tellement faible, tellement peu proportionnée au prix du temps que vous faites perdre au citoyen laborieux, qu'il n'y aura une juste compensation de charges qu’autant qu’elle sera supportée par le