Orateurs et tribuns 1789-1794

76 ORATEURS ET TRIBUNS.

Jacobins rouges, conspués, honnis par les uns et les autres, et, la mort dans l’âme, assistent à ces journées populaires qui, d’un seul coup, en quelques heures, déchirent les chiffons de papier constitutionnels, anéantissent les votes des assemblées, ruinent la royauté, mettent au-dessus des lois les philosophes à piques : leurs rares victoires sont des victoires blessées à mort.

Les principaux orateurs du groupe, Ramond, Vaublanc, Dumolard, Stanislas de Girardin, Quatremère de Quincy, Becquey, Mathieu Dumas, de Jaucourt ‘, Lemontey, Hua, partagent les sentiments, emploient les formules emphatiques de l’époque, soutiennent des propositions conservatrices avec des arguments démocratiques: c’est d'ailleurs le seul moyen d'obtenir quelque attention, la précaution oratoire indispensable dans une assemblée qui à l'habitude de délibérer au milieu des huées. Ainsi, lorsque Couthon demande une loi contre les prêtres insermentés, Ramond réclame la question préa-

1. Ni les discours, ni les écrits politiques de Jaucourt, de Quatremère de Quincy, le grand antiquaire, de Pastoret, jurisconsulte éminent, ministre de Louis XVI, chancelier de France pendant la Restauration, ne fournissent l'occasion de les ranger dans une galerie d'hommes d'esprit. Il y a cependant un beau mot de Pastoret que je dois rappeler. Après la Révolution de 1830 et sous prétexte de refus de sermen‘, on raya son nom de la liste des membres du Conseil général des hôpitaux de Paris : « Je croyais, ditil, n'y avoir, depuis trente ans, prêté serment qu'aux pauvres ».