Souvenirs militaires d'Octave Levavasseur, officier d'artillerie, aide-de-camp du maréchal Ney (1802-1815) : un officier d'état-major sous le 1er Empire

292 SOUVENIRS D'OCTAVE LEVAVASSEUR

le maréchal en fût instruit ; que, la droite des troupes de Ney s’étant trouvée découverte, la cavalerie ennemie y avait pénétré; que cette charge avait causé la déroute de Charleroi, et que bientôt après Drouet d'Erlon avait été renvoyé, de telle sorte que la journée s’était passée pour lui en marches et en contremarches, et qu’il n'avait pu rejoindre le maréchal qu'à 8 heures du soir, quand on ne se battait plus (1).

(1) Tels sont les divers motifs qui empéchèrent le maréchal Ney d'occuper, le 16, les Quatre-Bras, pendant que l'Empereur se battait à Fleurus et chassait les Prussiens de leurs positions de Ligny et Saint-Amand. Wellington, avec des forces anglo-hollandaises triples de celles que pouvait opposer Ney, occupait déjà la position des Quatre-Bras, lorsque à midi le maréchal reçut l'ordre de s'en emparer et de manœuvrer sur les derrières de Blücher, vers Ligny. — Il est constant que, si le maréchal Ney eût de grand matin reçu l'ordre de s'emparer des Quatre-Bras et de manœuvrer sur Ligny avec ses 45 000 hommes, Blücher eût été détruit, et Wellington n'eût pu déboucher de la forêt de Soignes. Le peu de troupes, qui occupaient alors cette position, y auraient été refoulées, et nous serions entrés dans Bruxelles le soir même, derrière les Anglais en retraite. Mais, lorsque l'Empereur dicta cet ordre, à 9 heures du matin, il ignorait que le jour même il rencontrerait les Prussiens et leur livrerait bataille, et que Wellington alors débouchaït de la forêt : vers les midi, lorsque le maréchal Ney reçut cet ordre, la position des Quatre-Bras était occupée par 20 000 hommes, qui furent portés à 36000 à 4 heures, tandis qu’à midi le maréchal n'avait que 9 000 hommes, à 4 heures, par l’arrivée du prince Jérôme, 16 000 et, à 8 heures du soir, par celle de d’Erlon, 45 000. (Note d’O. Levuvasseur.)

__ L'auteur a voulu ici justifier l’inaction de Ney dans la matinée du 16 juin et son offensive tardive et trop peu poussée contre les Quatre-Bras : le calcul des troupes, dont disposa le maréchal le soir, est conforme aux documents officiels, bien que l'effectif du Is corps (d'Erlon) soit quelque peu majoré aux dépens de celui de l'infanterie et de la cavalerie, engagées dans le jour.

En tout cas, Ney, qui aurait dû faire enlever la position dès