Théveneau de Morande : étude sur le XVIIIe siècle

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lieu. Beaumarchais, malgré tout son talent et tout son esprit, malgré l'évidente justice de sa cause, avait été condamné au bläme, le 26 février 1774, par arrêt du parlement Maupeou. C'était une peine infamante qui le rendait incapable d’exercer aucune fonction publique. Bien que « toute la France se fût fait inscrire chez lui », comme il l’écrivait à un ami !, quelques jours après la sentence, Beaumarchais, frappé d’une flétrissure légale, forcé de se taire par un ordre exprès de M. de Sartine que le roi lui-même avait dicté, paraissait irrémédiablement perdu, lorsque le contre-coup des intrigués de Morande vint lui offrir un moyen de salut. Le Wilkes francais, comme on avait surnommé le futur auteur du Barbier de Séville, avait pour ami le courtisan dilettante La Borde?, qui était premier valet de chambre

1. Voir cette lettre dans l’ouvrage de M. de Loménie : Beaumarchais et son temps, t. I, p. 374. M. de Loménie a résumé très exactement dans le même livre l’histoire des rapports de Beaumarchaïs avec Morande et avec le chevalier d'Éon. Mais il y a encore bien à dire sur les intrigues de cette remuante colonie d’aventuriers français qui avait établi à Londres son quartier général et dont Voltaire disait : « Je ne connais rien à ce monde. » Il y a quelque intérêt à faire connaître ce que les contemporains eux-mêmes ne démélaient qu'avec peine.

2. La Borde a fait notamment la musique de l’An-