Un Agent des princes pendant la Révolution : le Marquis de La Rouërie et la conjuration bretonne 1790-1793 : d'après des documents inédits

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sacs d'argent et d’autres objets jugés nécessaires pour compléter la somme convenue. M" de SainteAulaire était fort émue ; elle se croyait, non sans apparence, exposée à un grand danger. Lalligand pouvait n'être pas seul chez lui; une fois nantis de la somme, ses complices ou lui-même Jugeraient peut-être utile de faire parade d’austérité, en dénonçant des séducteurs pris en flagrant délit; la tête pleine de ces tristes pensées, Louis de Sainte-Aulaire attendit toute la nuit avec anxiété. Sa mère revint au point du jour, toute joyeuse, et lui conta comment les choses s'étaient passées : les pièces accusatrices contre M. de Noyan avaient été remises aux mains de Montrocher, qui les avait lues et examinées avec un soin minutieux avant de les jeter au feu. On avait ensuite compté l'argent, livré les valeurs que Lalligand avait reçues sans nouvelles exigences et en promettant pour l’avenir sa protection et celle des chefs du Comité de Sûreté générale. On s’était séparé bons amis. Montrocher cependant revenait très irrité de ce brigandage. A grand’peine il s'était contenu pendant l'opération ; la montre garnie de brillants, escroquée par-dessus le marché, lui paraissait surtout un cas pendable, et il se moquait de M*° de Sainte-Aulaire, qui ne pouvait se défendre d’une sorte de reconnaissance pour le misérable qui sauvait son père en la dépouillant.