Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues
VOYAGE EN ORIENT (1778-1779) 2€
dans les couvents, où il cherchait quelque manuscrit précieux, et où il affirme avoir découvert et inutilement offert d'acheter un Tite-Live complet en arabe, ainsi qu'un Diodore de Sicile également complet; au pied des Pyramides et des autres monuments de la vieille civilisation égyptienne, qu'il contempla avec le désir de contrôler les assertions des voyageurs anciens et modernes, d'Hérodote et de Thévenot. Le Marseillais Magallon, alors sans titre le principal représentant de la France dans ces contrées, l’accueillit avec empressement et lui servit çà et là d’interprète et de guide. L'Égypte était déjà à la mode en France, et d’Antraigues conquit sur le Nil cette réputation géographique qui devait précéder dans les salons parisiens, où l’hellénisme faisait concurrence à l’américanisme, sa réputation politique.
Dès le printemps de 1779, après avoir fait escale à Chio, visité Smyrne et les ruines d'Éphèse, il était de retour à Constantinople. Le 6 mai, il reprit le chemin de la France par terre, au milieu de la plus singulière caravane. |
Il avait pour compagnon de voyage un bourgeois hollandais, l'envoyé de Suède en Turquie, un attaché de l'ambassade française, et enfin la princesse Ghika, qui se plut à reconduire, flanquée de son aumônier, son amant jusqu'en Pologne. Cette petite troupe cheminait en trois carrosses, suivie de nombreux bagages, avec un firman et une escorte accordés par Sa Hautesse. Nos voyageurs étaient donc gens d'importance, qui avaient droit à tous les hommages et se croyaient permises toutes les licences. On les recevait avec pompe à l'entrée des villages; des jeunes filles venaient jeter du froment sous les pieds de leurs chevaux en signe de bienvenue, et des présents arrachés à la misère des populations les