Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues
58 CHAPITRE DEUXIÈME.
clubs élégants de l’époque, revinrent ainsi brusquement, durant les premiers jours de 1789, à l’adoration du passé. D'Antraigues se décida à décliner (il avait sollicité en secret, assure-til, l'avis du roi) le mandat qui lui était offert par le tiers état de Paris. Dans sa province, même comédie : ses compatriotes voulaient faire de lui un député des communes: il les remercia (1). Eût-il conçu l'espoir de devenir un porte-drapeau, il ne voulait pas entrer, comme Mirabeau et Sieyès, dans des rangs où il passerait, bon gré, mal gré, pour un transfuge.
Le 26 mars, les ordres du Bas-Vivarais, réunis à Vil-
neuve de Berg ,procédèrent à la confection des cahiers et à la nomination des députés. D’Antraigues avait sans doute rassuré ses collègues de la noblesse sur la valeur de son soi-disant manifeste, car il fut choisi par eux comme secrélaire de son ordre, et par conséquent chargé de la rédaction du cahier (2). ? Ce cahier, qu'il est curieux de Parcourir après le fameux Mémoire, nous présente le Programme politique de l’auteur réduit à des Proportions raisonnables, dégagé de toute vue systématique et chimérique (3). D'un bout à l'autre, son style et ses idées y Sont reconnaissables.
Ce programme, fondé sur la doctrine du mandat impératif, se divise en deux parties. La première contient les pouvoirs, en d’autres termes, spécifie les réformes
(1) Deuicaères, Hisloire manuscrite d'Aubenas. (Comm. par M. Mazon.)
(2) Procès-verbal de l'assemblée générale des trois ordres du bas l’ivarais, tenue à Villeneuve de Berg le 26 mars 1789. BourgSaint-Andéol, imp. Guillet, in-4°, 105 pages.
(3) Ce cahier est imprimé dans les Archives parlementaires, t. VI, p. 177-182.