Colonies pendant la Révolution : la constituante et la réforme coloniale

CONFLIT COMMERCIAL ET ENTRAVES DOUANIÈRES 4105

toire. Rouen et le pays de Caux ont la spécialité des siamoises ou toiles de fil et coton, qui s’écoulent en France, en Espagne et dans les colonies d’Amérique; Troyes en produit des variétés qui ne sont pas inférieures. Mais ces toiles, fabriquées avec les cotons blancs des îles doivent être teintes, frottées avec un os de bœuf, bouillonnées, chinées, ete. ; elles demandent un apprêt très long et ne peuvent être vendues qu'à un prix s'élevant parfois à 9 livres l’aune. Comment peuvent-elles lutter sur le marché avec les toiles du Siam et du Bengale, qui sont faites avec le coton rouge, accaparé par la Chine, et qui sont imitées avec une égale perfection par les usines de Manchester? Les machines à carder et à filer, malgré l'invention du mécanicien Kay, de Rouen (1758), sont loin d’être aussi parfaites en France qu'en Angleterre!. Il en est de même des mousselines ou tissus légers de soie et coton. Si l’on pouvait traiter les cotons des colonies en gousses, on en extrairail les graines mécaniquement, avec plus de promptitude et de propreté que les Indiens, qui égrènent à la main, et l'on aurait des filaments de plus belle venue : mais les colons n'ont pas l'habitude de ces expéditions. Il en résulte que les mousselines de l'Inde, comme les siamoises, chassent du marché celles de France. On n'a même pas pu entreprendre d'imiter les toiles peintes du Coromandel; l'Europe ne produit pas les matières qui entrent dans la

4. V. le Discours de Lecouteulx de Cauteleu (séance du 3 avril 1790; Arch, parlem., XII, 528, annexe; Proc.-verb., n° 247, p. 1-9, t. XVII).