Correspondance diplomatique de Talleyrand. La mission de Talleyrand à Londres, en 1792 : correspondance inédite de Talleyrand avec le département des affaires étrangéres le général Biron, etc.
422 LETTRES DE TALLEYRAND
ment bien embarrassant pour observer que celui où les passions partout poussées jusqu’à l'extrême ne laissent ni aux hommes ni aux choses leur caractère naturel. Quelle attention ne faut-il pas pour déméler les ressorts de ces passions différemment agissantes, distinguer, séparer les effets qui appartiennent à des causes diverses, et dans leurs contradictions apparentes saisir ce qui est occasionnel et passager pour ne pas le confondre avec ce qui est permanent et indépendant de la mobilité des circonstances! Dans de tels moments, il n’y a point de différence entre un jugement léger et un jugement faux : l'erreur est à la surface ; il faut approfondir pour trouver la vérité.
Les liens de sujet à souverain qui unissaient autrefois l'Amérique et l'Angleterre, sont irrévocablement détruits ; et toute idée de les ressusciter, tout effort pour y parvenir, toute espérance donnée ou reçue à ce sujet ne peut être regardée que comme le délire d’une imagination malade ou d’une grossière et trompeuse adulation. Je regarde cela comme convenu
1 C’est pendant son séjour à Philadelphie que Talleyrand entretint le général Hamilton, un des hommes d’ État les plus distingués des Ltats-Unis, d'un projet d'union douanière entre l'Europe et les États-Unis.
Le général Hamilton lui répondit en faisant adopter par le Congrès américain un nouveau tarif des douanes tel que pouvait le concevoir et le réaliser la douane américaine elle-même.
Talleyrand n'a pas dû, à son retour en France, importer d'illusion sur le sort réservé aux États-Unis à tout projet du même genre.
L'état des affaires du nouveau monde, en mars 1889, prouve qu'il devançait singulièrement son temps en 1795.