Correspondance inédite de La Fayette : lettres de prison, lettres d'exil (1793-1801)

CORRESPONDANCGE INÉDITE 263

Cher Mazzei, puisqu'il se trouve, dans la succession de mes cachots, que je suis destiné très vraisemblablement à mourir votre voisin, je saisis une occasion pour introduire auprès de vous un ami, et m'en rapportant à ce qu'il a à vous dire, je me borne à ajouter que je suis très affectueusement votre

L. F.

Lerrre XXII (OUVERTE). A Madame de Maisonneuve].

Neisse, en Silésie, 16 février 179%.

Je ne puis vous exprimer, ma chère, avec quel intérêt j'ai reconnu quelques lignes de vous, et, quoique votre société actuelle ne soit pas, je pense, plus favorable pour moi que les cabinets coalisés et les clubs jacobins, j'espère que ma lettre, en passant par l'inspection de mes gardiens, aura fait une suffisante quarantaine. Vous savez que depuis le jour où mes principes moraux et mes devoirs constitutionnels m'éloignèrent de France et où, cherchant un pays neutre, je tombai dans des mains qui ne l'étaient pas, on m'a fait subir un cours de cachots dont le dernier terme, en me séparant même de Maubourg, m'a placé dans les souterrains d’un fort dépendant de Neisse. Le peu de nouvelles que j'ai pu donner vous aura été communiqué par M" d'Hénin, et comme je lui ai dernièrement écrit d'ici’, je ne répéterai pas ces tristes détails; mais s’il est vrai que les jacobins me déclarent mort et enterré, je voudrais

1. C'est la lettre à Me d'Hénin du 27 janvier 1794, publiée dans les Mémoires, t. IV, p. 258. Qu'elle soit mentionnée dans celle-ci, cela indique que La Fayelle l’avait envoyée ouverte; de là les malices qu'elle contient et le peu d'indications qu'elle fournit.