Correspondance inédite de La Fayette : lettres de prison, lettres d'exil (1793-1801)

328 CORRESPONDANCE DE LA FAYETTE

Je m'adresse donc à vous, citoyen Directeur, avec toute la confiance que donnent à un prisonnier d'OImütz ses obligations passées ; avec toute l’ardeur que n'inspirent à la fois le patriotisme et l'amitié, pour vous recommander ce petit nombre d'officiers que j'associai, en 92, à une résistance dont la responsabilité appartient à moi seul; moi seul aussi je déterminai leur départ; et lorsque, partagé entre la crainte d'enlever au territoire français un individu qui püt encore la défendre, et celle d'abandonner à la mort un martyr de plus des lois jurées, je choisis scrupuleusement mes camarades de malheur, la plupart d’entre eux, à ce déchirant passage de la frontière, ne savaient pas où les conduisait l’obligation impérieuse d'accompagner leur général; tous ont été plus ou moins longtemps prisonniers des Autrichiens.

Ce sont ces amis inaltérables de la liberté et de l'égalité, distingués dans cette cause par des services anciens et purs, et brülant du désir si naturel d'en rendre de nouveaux, que le gouvernement peut, d’un seul mot, rappeler au sein de la République à laquelle des principes éprouvés et des sentiments bien connus garantissent non seulement leur fidélité, mais leur amour pour la constitution que notre patrie s’est donnée.

Salut et fraternité. L. F.

Citoyen Directeur Barras',

Quoique les prisonniers d'Olmütz, délivrés par la victorieuse intervention du gouvernement, aient adressé au ministre des relations extérieures? le tribut officiel de leur reconnaissance, permettez-moi de

1. Ce qui suit est en post-scriptum dans le manuscrit. 2. Talleyrand. (Cf. p. 306, n. 4.)