Discours de M. le général Cubières, pair de France, ancien ministre de la guerre, membre du Comité d'infanterie : recueillis et précédés d'une notice historique par un officier de l'ancienne armée

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Pour nous faire comprendre l'intensité de la fièvre des chemins de fer, l'honorable auteur de la proposition nous a énuméré trente-une compagnies organisées pour des lignes bonnes ou mauvaises dont les travaux exigeraient plus de ? milliards.

La formation de trente-une compagnies est à nos yeux un fait de concurrence qui ne doit pas nous effrayer. Il ne s’agit pas de trente-une lignes de chemins de fer, mais seulement de neuf lignes que se disputent trente-une compagnies. De compte fait, ces neuf lignes, dont trois ne sont pas classées, forment un développement de 5,009 kilomètres ; elles exigeront, pour leur construction et pour le matériel de leur exploitation, environ 1,400 millions. Ce serait donc, en six ou sept ans, une dépense de 200 millions par année, Dans notre opinion, ce ne serait pas là une masse d'entreprises au-dessus des ressources et des forces du pays, pourvu que les spéculations ne tentent point d'aller au delà.

Remarquez, messieurs, qu’il ne s’agit pas ici d’une dépense improductive : il s’agit, au contraire, dela création de valeurs nouvelles, en portant, au moyen des chemins de fer, la vie et le mouvement partout où l’industrie ira saisir la production pour la transformer et pour la livrer à la consommation.

Je ne vois rien d’exagéré dans 1,400 millions de chemins de fer, dont l'exécution durerait au moins sept ans; et si, dans le nombre, il ÿ à de mauvaises lignes, l'expérience qui en aura été faite produira plus d’effet qu’une loi pour calmer l’engouement dont les esprits sages ont raison de s’ef frayer.

Trente-une compagnies pour neuf lignes, c’est environ quatre compagnies pour chaque ligne ; mais, sur les quatre compagnies, une seule deviendra adjuditataire, et si c’est à de bonnes conditions, on peut être assuré que les sociétaires exclus par ladjudication rechercheront immédiatement les actions de l’entreprise qui leur a échappé, ou se hâteront de soumissionner une autre ligne. C’est ainsi qu’on a vu les capilaux des compagnies éconduites par le résultat des den.