Entre slaves

6 ENTRE SLAVES

L'éducation du roi, son esprit très ouvert aux raffinements européens l’éloignaïent aussi de ses sujets. Dans le milieu royal même, certains, malgré l'exemple du souverain et de son élégante compagne, restaient assez grossiers au moral comme au physique et incrustés dans leurs idées exclusives, locales.

En dehors d’une petite élite remarquable, beaucoup . de Serbes n'avaient gagné au contact de l'Europe qu'un frottement superficiel d'où jaillissaient seulement quelques rares étincelles.

La barrière morale entre le roi et ses sujets, s’élevait encore plus haute, dans les années qui suivirent 1878, par suite de la direction imprimée par Nilan à sa politique extérieure.

Le roi avait trouvé, en effet, un appui dans le cabinet de Vienne pendant le congrès de Berlin; depuis, il n'avait pas jugé bon d'adopter les antipathies de ses sujets, et il restait convaincu qu'une politique amicale avec l’Autriche-Hongrie procurerait à son pays plus d'avantages qu'une hostihité impuissante.

C'est ce que l’on ne comprenait pas à Belgrade. L'hostilité contre l'Autriche, mais c'était elle, en grande partie, qui alimentait les sources du patriotisme. La réduire, c'était trahir.

L'éducation diplomatique des Serbes restait à faire.

C’est un Autrichien! disait-on en parlant du souverain. Les événements de Bulgarie allaient fournir à tous les mécontents un terrain propre à l'action.