Étude sur les idées politiques de Mirabeau
58 F. DECRUE.
l'arbitraire est dans certains cas nécessaire, ce n’est pas au roi qu'il faut le permettre! , et que le roi n’a, pas plus que la société, le droit de vie et de mort?. Il convient que c’est en son nom que se rend la justice® ; mais le roi ne peut juger ni par lui-même ni par ses ministres. Le caractère de la tyrannieest, en effet, que le même homme prononce et exécute le jugement. Mirabeau accordait au roï, en une certaine mesure, le droit de déléguer l'autorité judiciaire en érigeant des tribunaux selon les lois de l° États.
Mais, quand il vit qu'on n’adjoignait pas de jury au tribunal civil, il contesta au roi le privilège de nommer les juges, même les juges de paix. Cependant il le reconnaissait comme partie publique dans tous les délits. Le roi doit les poursuivre au moyen de ses procureurs7. En somme, quand il s’agit de juger, le roi n'intervient ni directement ni indirectement ; mais, une fois la décision formulée, son devoir consiste à l’exécuter au moyen de ses agents$.
L'action du gouvernement sur le pouvoir judiciaire ne s’éclaircit qu'après l'étude de ce pouvoir même. De même les rapports du monarque avec l’Assemblée nationale ne sont nettement déterminés qu'après une connaissance approfondie des fonctions de ce Corps.
1. Lettres de cachet, t. I, p. 211.
2. Ibid., p. 99.
3. Ibid., p. 81. Le Courrier de Provence conteste au roi ce privilège honorifique, v. VI, p. 123-128; VIL p. 123, 214 et 215; v. VIIL, p. 144; v. IX, p. 181.
L. Lettres de cachet, t. I, p. 116, 157, 181 et 210.
5. Ibid., p. 81.
6. Moniteur, p. 512 Discours du 5 mai 1790. Cf. Courrier de Provence, v. VIN, p. 126, 147 et 151; IX, 202, et XI, 316 à 318.
7. Lettres de Vincennes; Lettres de cachet, v. I, p. 81. Courrier de Provence, v. NIIL, p. 151, 156, et IX, p. 202.
8. Cf. Affaire La Vauguyon. Moniteur du 5 août 1789 et Archives parlementaires, p. 395.