Gentilshommes démocrates : le vicomte de Noailles, les deux La Rochefoucauld, Clermont-Tonnerre, le comte de Castellane, le comte de Virieu

LE COMTE DE CASTELLANE 191

Le 1° aout enfin il insiste avec une éloquente âpreté pour qu'une déclaration des droits de l’homme soit mise en tête de la constitution. « Ne voyons-nous pas, s’écrie-t-il, des peuples entiers qui se croient la propriété de quelques seigneurs? Ne les voyons-nous pas presque tous s’imaginer qu’ils doivent obéissance à des lois faites par des despotes qui ne s’y soumettent pas? Est-il une nation qui ait plus constamment que la nôtre méconnu les principes d'après lesquels doit être établie toute bonne constitution?Si l'on en excepte le règne de Charlemagne, nous avons été successivement soumis aux tyrannies les plus avilissantes. A peine sortis de la barbarie, les Français éprouvent le régime féodal, tous les malheurs combinés que produisent l'aristocratie, le despotisme et l'anarchie. Ils sentent enfin leurs malheurs; il prêtent aux rois leurs forces pour abattre les tyrans particuliers; mais des hommes aveuglés par l'ignorance ne font que changer de fers : au despotisme des seigneurs succède celui des ministres. N’en doutons pas, l’on ne peut attribuer cette détestable invention (les lettres de cachet) (1) qu’à l'ignorance où les peuples étaient de leurs droits. Jamais les Français devenus fous tous ensemble n’ont dit à leur roi : nous te donnons une puissance arbi-

Non seulement elle ouvrait sans scrupule celles des particuliers, mais encore elle arrêtait les courriers des puissances étrangères.

(1) Au cours de sa carrière parlementaire, le comte de Castellane revint plusieurs fois sur la question des lettres de cachet. Aucun de ses proches n’en avait été victime. Son plaidoyer n’était donc pas pro domo sua, mais pour la liberté qu’il aimait. ,