Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870

172 LA LIBERTÉ DE CONSCIENCE EN FRANCE

pensait qu'un bon catholique peut, sans se retirer du siècle, observer fidèlement sa religion et servir l'Église.

Depuis 1833, il avait adressé à l'archevêque de Paris plusieurs pétitions tendant à ouvrir la cathédrale à un enseignement religieux, qui sortit du ton ordinaire des sermons. Il désirait qu'on traitât les questions sociales qui préoccupaient alors la jeunesse, et il proposait pour inaugurer ce genre nouveau l'abbé Lacordaire, qui prêchait avec suecès à la chapelle du collège Stanislas. Mais M# de Quelen, inquiet de voir renaître le mouvement mennaisien, fit longtemps la sourde oreille. Il finit par ouvrir la chaire de NotreDame à l'abbé Lacordaire, — mais seulement pendant deux années (1835-36). On sait le succès obtenu par ces conférences pour hommes, où le disciple assagi de Lamennais, transforma l’apologétique catholique, en la retrempant dans l'étude des questions sociales et philosophiques.

Sur la question de la liberté d'enseignement secondaire, le roi Louis-Philippe et les différents ministres, sauf M. Guiïzot, se montrèrent plus récalcitrants, car ïls se méfiaient des empiètements du clergé et surtout des congrégations enseignantes. Ainsi Guizot aurait voulu renoncer au principe de la souveraineté de l'État en matière d'instruction publique et « adopter « franchement, avec toutes ses conséquences, celui de la « libre concurrence entre l'État et ses rivaux, laïques ou « ecclésiastiques °». Mais obligé de tenir compte des méfiances de la bourgeoisie voltairienne d'alors — il présenta en janvier 1836 et reprit en mars 1837 un projet de loi sur l'instruction secondaire, qui ajournait la question des petits séminaires et celle des congrégations religieuses, autorisées ou non, mais qui, du moins, étendait la liberté à toutes les écoles privées, en imposant seulement certaines conditions de grade et de moralité aux maîtres et les soumettant à l’inspection de l'État.

1. Mémoires, t. IIL, p. 102 et suivantes.