Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870

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qu'elles fussent. Les réunions religieuses étaient donc assimilées aux clubs politiques et, si l’on avait eu des doutes sur la portée du décret, un arrêt de la cour de cassation du 9 décembre 1853 les eut bientôt dissipés.

S 2. Le deuxième empire ne se contenta pas d'admettre les cardinaux au Sénat et de laisser pleine liberté aux évêques, il combla l'Église d’honneurs et de libéralités ; il rétablit la grande aumônerie supprimée depuis Charles X, accrut la dotation des cathédrales et le budget du clergé. Le Panthéon fut rendu au culte catholique (6 décembre 1851) et la congrégation des chapelains de Sainte-Geneviève fut fondée afin de prier pour les âmes des grands hommes déposés dans les caveaux ". Les missions catholiques à l’intérieur furent tolérées et l’on vit, comme en 1816-18, les processions, escortées de troupes, préfets et généraux en tête, dérouler leurs bannières au dehors des églises, au mépris des lois expresses de la première République”. Les travaux furent suspendus le dimanche, sur tous les chantiers de l’État, par ordre supérieur (Moniteur du 6 juillet 1854). Bref le catholicisme se sentait presque redevenu la religion de l’État.

Il faut avouer que les évêques avaient bien gagné ces faveurs, disons mieux, ces privilèges par leur attitude en présence du coup d’État. Le clergé catholique en masse, guidé par l'Univers, avait acclamé l'empire, comme il avait béni les arbres de la liberté en 1848. Seuls un petit nombre d’évèques protestèrent par leur silence contre la violation du droit; entre autres M# Dupanloup, évêque d'Orléans”; Jacquemet, évêque de Nantes ; Dupont des Loges, évêque de Metz. Ce dernier, écrivant à M£' Pie quelques semaines après, exprimait sa tristesse de ce que le clergé et l’épiscopat €

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perdissent la position si belle et si indépendante que la « Providence leur avait faite, en se précipitant aux pieds

1. Décret du 6 avril 1852.

2. V. Loi du 7 vendémiaire an IV, art. 16.

V. son {nstruction pastorale sur la liberté de l'Eglise (3 décembre 1851).

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