Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870

SOUS L'EMPIRE AUTORITAIRE (1892-1860) 272

D' Lelut et d'Achille Fould, banquier du prince Président, M. Fortoul recula et, par une note insérée au Moniteur du 1 août 1852, annonça qu'un certain nombre de candidats protestants et israélites seraient admis au concours.

Une tentative plus grave encore eut lieu contre la liberté de conscience et cette fois, chose étonnante, elle fut faite par un des évêques qui, sous Louis-Philippe et la deuxième république, avait le plus hautement réclamé la liberté d’enseignement au nom des catholiques. On apprit à la fin d’octobre 1856 que M# Parisis, évêque d’Arras, Boulogne et Saint-Omer avait adressé une circulaire aux directrices d'institution ou chefs de pensionnat du Pas-de-Calais qui recevaient des élèves protestants. Consulté sur la question de savoir, si On pouvait dispenser ces élèves d'assister aux prières catholiques, il avait répondu : « Il serait mieux que « tous les enfants fussent présents aux mêmes exercices et il « faut y tendre. Néanmoins, on peut leur laisser faire les pra« tiques de leur culte. Mais, si le maître les y conduit comme « à un devoir, il donnerait un démenti à ses propres croyances, « professerait l’indifférentisme et donnerait scandale aux « enfants catholiques ». — On devine l'émotion qu’une telle théorie de prosélytisme par insinuation produisit dans les colonies anglaises de Boulogne-sur-Mer et de Calais, où elle fut bientôt connue. L’évêque eut beau dire que la circulaire était « confidentielle » et essayer de l’atténuer par une lettre pastorale (14 sept.), le scandale fut grand et le ministre de l'instruction publique, M. Rouland, crut devoir, par une lettre adressée au recteur de l’Académie de Douai, promettre que la liberté des cultes serait respectée dans les écoles mixtes ?.

On voit, par cet exemple, comment le haut clergé catholique, quand il se croyait le maître, entendait ce respect de la

1. Parmi les candidats se trouvaient M. Michel Bréal, aujourd’hui professeur au Collège de France, et Georges Perrot, directeur de l'École normale supérieure.

2 Lien des 27 septembre et 4 octobre 1856.