Journal d'un étudiant (Edmond Géraud), pendant la Révolution (1789-1793)

JOURNAL D'UN ÉTUDIANT PENDANT LA RÉVOLUTION 105

sera-t-il done au-dessus des lois? Hélas oui!), remplies d'armes et de munitions pour les émigrés. Ceux qui ne sont pas des bêtes ou des Parisiens ne doutent point qu’il n'existe une correspondance secrète entre la cour et les princes fugitifs. »

Les premiers émigrés, qui se sont établis à Turin sous la conduite du comte d'Artois, n’ont pas réussi dans leurs desseins, et leurs efforts pour soulever le Midi de la France sont restés infructueux.

Découragée par son insuccès, l’émigration se résout à transporter le centre de ses opérations dans un endroit qu'ellé suppose devoir lui être plus favorable et où il lui sera plus facile de solliciter et d'obtenir l'appui des puissances. Elle s'établit à Coblentz, dans le territoire de l'électeur de Trèves et elle s'organise militairement sous le commandement du prince de Condé pour marcher en tête des armées étrangères à la conquête de la France rebelle.

À partir de ce moment le mouvement d'émigration s'accentue en France d’une façon inquiétante. Ce n'est pas que la situation soit plus troublée ni les dangers que l'on court plus pressants, mais la mode s'en mêle et il devient de bon ton d'aller grossir le nombre de {ceux qui attendent à l'étranger le retour imminent de l’ancien ordre de choses. L'on court aux armes contre son pays comme si l'on courait à l'accomplissement du devoir le plus sacré. Un monte en carrosse au sortir de l'Opéra et l’on part gaiement