L'oeuvre sociale de la Révolution française

346 L'ŒUVRE SOCIALE DE LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

nation. Le contingent des étrangers, quoique considérable, n'y forme qu'une minorité : les officiers sont recrutés dans la noblesse française et les soldats dans le tiers état du royaume. Cependant cette armée ne représente pas la nation.

Les officiers représentent bien, eux, la classe de la nation à laquelle ils appartiennent : la noblesse. Ils considèrent le service militaire comme un devoir, comme un honneur, et tout gentilhomme vraiment digne de son titre de gentilhomme tient à figurer un temps dans l’armée. Le soldat ne représente point la classe du tiers état : c’est un mercenaire qui loue ses services au roi pour une période déterminée moyennant prime d'engagement et salaire, le service militaire est pour lui un métier, et comme il ne peut devenir officier c'est un métier ingrat. Ne s'y vouent donc que les individus dépourvus de toute ressource, les miséreux, les aventuriers; à l'exception des Jeunes gens que séduit le prestige de l'uniforme, la grande majorité des roturiers s'y dérobe, et la foule des soldats ne représente cette classe de la nation qui s'appelle le tiers élat, que dans ses éléments les moins considérés et les moins dignes de considération.

Cette armée qui ne représente pas la nation est, de plus, placée sous un régime d'exception. Les troupes sont soumises à des lois particulières, beaucoup plus dures que celles qui pèsent sur les