La correspondance de Marat

LA CORRESPONDANCE DE MARAT 54

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Lettre de M. le marquis de Gouy, datée de Paris, le 21 août 1781.

J'ai le malheur, Monsieur, de voir périr sous mes yeux mon fils cadet, qui est actuellement dans un état affreux.

A la suite d’une hémoptysie dans laquelle il a perdu, à Lille, il y a deux mois, plus de cent vingt onces de sang, sa poitrine s'est attaquée, et depuis six semaines environ il crache le pus en abondance.

Ils’est mis, à son arrivée ici, entre les mains de M. Borie; ce médecin, jugeant le malade dans un état fort dangereux, a appelé le 12 de ce mois, pour consulter, Mess. Bouvard, Malhouet, Guindant et Sigaud. J'ai assisté à la consultation, et j'ai eu le désespoir de voir mon malheureux enfant condamné unanimement par ces cinq docteurs. Le lait qu’ils prescrivirent, et le régime nouveau qu'ils ordonnèrent au malade, me donna quelques heures d'espérance, mais M. Borie, qui le suit assidûment, m'ayant assuré hier de la manière la plus positiveque le poumon était on ne peut plus profondément ulcéré, et qu'il regardait sa cure comme physiquement impossible, je veux me tourner, Monsieur, vers le médecin des incurables. M®° la marquise de Laubespine était condamnée, il y a quatre ans, lorsque vous eûtes la gloire de la guérir. La santé dont elle jouit encore à présent me laisse tout à espérer de vos lumières, si vous voulez les consacrer à la guérison de mon fils. Je vous envoie un carrosse, je vous supplie de venir le voir, c’est en vous seul qu'un père malheureux- met toute son espérance. Je ne vous parle pas de ma reconnaissance et de tous les sentiments d’estime que je vous ai voués.

(Signé) Goux.