La France sous le Consulat

RUINE DE L’INDUSTRIE 245

que quelques exemples pris dans les rapports des consellers d'Etat en mission, tel fabricant de Paris qui, avant la Révolution, avait jusqu’à 70 ou 80 ouvriers, en emploie 10 au plus en l'an VII Lyon qui, en 1788, possédait 14.777 métiers pour les étoffes de soie, dont 9.335 en activité, ne possède plus, en l’an IX, que 5.000 métiers en activité, soit 4.335 de moins qu’en 1788 ; le tissage de l'or qui, en 1780, faisait un chiffre de 10 millions d’affaires, n’en fait plus que pour un million, l’an IX; la chapellerie, qui employait 8.000 ouvriers jusqu’en 1792, n’en utilise plus que 1.500. Non seulement les industries de luxe, comme celle des dentelles en Normandie, sont tombées, mais aussi les manufactures de draps de Louviers, celles de toiles en Bretagne, les fabriques de papier dans la Charente.

Bonaparte veut relever de cette ruine l’industrie française, la développer et l’enrichir de branches nouvelles pour subvenir à nos besoins, permettre à la France de se passer de l'étranger, et disputer aux Anglais le marché européen. Il est aussi intraitable que Colbert lorsqu'il s’agit d'affranchir notre industrie de toute dépendance de l'étranger. Le ministre directeur de l’administration de la guerre lui propose de faire acheter du drap pour la troupe dans les manufactures d'Allemagne. Il répond de Namur, où il est de passage, que, même si réellement {ce dont il doute) la quantité des produits de nos anciennes fabriques de drap était insuffisante, « la direction devrait proposer les moyens propres à élever leur fabrication jusqu'à nos besoins; car, sous quelque prétexte que ce soit, le Gouvernement ne peut se décider à demander à l'étranger ce qu'il doit obtenir de l'industrie nationale ercitée et bien dirigée’. » L'obligation de suffire à la consommation nationale à été une nécessité pour l’industrie française pendant les guerres de la Révolution. Lorsque les traités de Lunéville et d'Amiens ont

1. Corr., t. VIIL. Décision, 3 août 1803.