La France sous le Consulat

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quante ans d’ignorance. Toutes les tentatives échoueront et leurs auteurs en seront victimes. Ce n’est pas commegénéral que je gouverne, mais parce que la nation croit que J'ai les qualités eiviles propres au gouvernement; si elle n'avait pas cette opinion le gouvernement ne se soutiendrait pas. Je savais ce que je faisais lorsque, général d'armée, je prenais la qualité de membre de l’Institut; j'étais sûr d'être compris même par le dernier tambour *.

Cependant, en 1802, au milieu de l'immense élan de reconnaissance provoqué par le rétablissement de la paix, en présence du sentiment universel qui identifiait avec sa personne la sécurité de la République, il laissa entrevoir son désir. *

Le 6 mai 1802, le Tribunat, par l'organe de son président, Chabot (de l'Allier), émit le vœu: « qu'ilfût donné au général Bonaparte, Premier Consul, un gage éclatant de la reconnaissance nationale. » Le lendemain, en recevant la députation du Tribunat, le Premier Consul répondit : « Je ne désire d'autre gloire que celle d’avoir rempli tout entière la tâche qui m'est imposée. Je n’ambitionne d'autre récompense que l'affection de mes concitoyens. » Au Sénat appartenait de donner suite au vœu du Tribunat. Le Sénatus-consulte du 18 floréalan X (8 mai 1802) réélut pour dix ans Premier Consul Napoléon Bonaparte, à dater de l'expiration des dix années pour lesquelles il avait été nommé. Cette prolongation parut insuffisante à Bonaparte qui voulait le pouvoir viager. L'esprit fertile en expédients de Cambacérès et de Lucien Bonaparte lui suggéra le moyen d’éluder le présent importun du Sénat et d'obtenir ce qu'il désirait. En remerciant par un Message le Sénat de cette preuve d'estime qui serait « toujours gravée dans son cœur », le Premier Consul ajoutait : « Le suffrage du peuple m'a

_4. Paroles du Premier Consul au Conseil d'État, dans la séance du 4 mai 1802 ; extrait des Mémoires de Thibaudeau. Correspondance, t. VII,