La France sous le Consulat

92 LA FRANCE SOUS LE CONSULAT

il apprit que le duc d'Enghien, que l’on n'attendait que dans la soirée, était arrivé et qu'il était en route pour Vincennes.

I se rendit alors lui-même à Vincennes avec les troupes destinées à fournir le peloton d'exécution. Harel, commandant du châleau de Vincennes, avait fait creuser une fosse dans le fossé, au bas du pavillon de la reine. Réal, mformé inopinément du départ du prisonnier pour Vincennes, ne Jugea pas utile de s’y rendre, sachant que l'affaire serait menée selon la volonté du Premier Consul.

Le duc d'Enghien arriva au château de Vincennes à cinq heures et demie du soir (20 mars 1804). Les membres de la commission s’y rendirent à néuf heures. Le major Dautancourt procéda à l'interrogatoire à onze heures, conformément aux chefs d'accusation contenus dans l'arrêté consulaire. « Le prince, avant de signer le procès-verbal, demanda une audience du Premier Consul. Dautancourt consentit à laisser écrire la demande et communiqua le tout à la commission, qui fit comparaître immédiatement le prisonnier. Savary était assis derrière le fauteuil du président. L'accusé « se présenta devant nous, raconte Hulin, avec une noble assurance. Il repoussa loin de lui l’accusation d’avoir trempé directement ni indirectement dans un complot d'assassinat contre la vie du Premier Consul. Mais il avoua aussi qu'il avait soutenu les droits de sa famille et qu’un Condé ne pouvait jamais rentrer en France que les armes à la main’. » Cet aveu suffit aux juges pour condamner à mort le prince convaincu d'émigration armée et de guerre civile. L'arrêt rendu, les commissaires s’occupèrent de l'audience demandée au Premier Consul : ils élaient d'avis d'en tenir compte. Sur ces entrefaites, Savary rentra dans la salle : « Messieurs, dit-il aux commissaires, votre affaire est finie, le reste me regarde. » Puis il sortit précipitamment, en tirant la porte sur lui. Le jugement

1. D'après A. Sorel, loc. cit.