"La Guzla" de Prosper Mérimée : étude d'histoire romantique (sa posvetom autora)

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CHAPITRE PREMIER.

niques dans la littérature française du xvn e et du xvm e siècle. Maints voyageurs occidentaux étaient passés par la péninsule des Balkans, à cette époque; voire même quelques expéditions scientifiques françaises 1 ; mais aucune de leurs relations de voyage, quoique très estimables, n’a obtenu un succès comparable à celui, considérable, des itinéraires turcs, persans ou chinois 2 . L’histoire offrait de meilleures sources à qui désirait connaître les Serbo-Croates'. On pouvait consulter surtout Y Histoire de la décadence de T Empire Grec et de Vétablissement de celui des Turcs, par l’Athénien Chalcondyle, ouvrage souvent réimprimé au cours de la seconde moitié du xvi e siècle ; Y Histoire universelle,A.& Th. Agrippa d’Aubigné, YHistoire de l’Empire Ottoman, par le chevalier Paul Ricault, et, surtout, les travaux importants d’un grand érudit de ce temps, Ch. Du Gange (1610-1668), l’auteur de YHistoire de l’Empire de Constantinople. Le livre de Ricault, qui fut constamment réédité jusqu’à la seconde moitié du xvin e siècle, contient également un récit dramatique de la bataille de Kossovo, bataille fatale aux Serbes, dans laquelle ils « perdirent leur Empire », en 1389. Mais ceci n’intéressa que des savants. Pour connaître un peuple, ce qu’il faut avant tout connaître : c’est sa langue. Or, personne en France ne connaissait alors celle des Serbo-Croates. L’ignorance,

1 A ce sujet, consulter la Bibliographie française sur les Serbes et les Croates, par M. Nicolas S. Pétrovitch (Belgrade, 1900), et les travaux du D r Pelar Matkovié, dans les Rad de l’Académie Sud-Slave d’Agram, et ceux de M. Stoyan Novakovitch, dans les Godichnitsa Nikolé Tchoupitcha et ailleurs. 2 Pierre Martine, L’Orient dans la littérature française aux XVIP et XVIII° siècles, Paris, 1906.