"La Guzla" de Prosper Mérimée : étude d'histoire romantique (sa posvetom autora)

« LA GUZLA » EN FRANCE.

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vous, chers lecteurs, demandait-il, ce que c’est que la Non sans doute, car moi-même, avant d’avoir entre les mains le petit volume dont je vais vous entretenir, j’aurais été fort embarrassé de répondre à cette question. Apprenez donc que la guzla est la lyre des Morlaques, des Croates, des Dalmales, de tous les peuples enfin qui habitent ces provinces illyriques qui firent un moment partie du grand empire, et qui en furent détachées avant que nous eussions eu le temps de faire connaissance avec ces Français improvisés. Cette lyre, il faut bien l’avouer, nous paraîtrait peu mélodieuse ; c’est une espèce de guitare, etc. À la fin de chaque vers, le chanteur pousse un grand cri ou plutôt un hurlement semblable à celui d’un loup blessé. « Il y a loin de là, sans doute, au violon de Lafont et aux accents de M lle Cinti ; mais si celle musique enragée faisait fuir tous nos dUettanli , les amis de la littérature peuvent mettre quelque intérêt à connaître les poésies auxquelles seront adaptés ces sauvages accords. Nous avons raffolé d’Ossian, de Byron ; qui sait si Maglanovich n’obtiendra pas aussi chez nous quelque célébrité? « Ce Maglanovich, l’Homère des contrées illyriques, est l’auteur des principales pièces contenues dans ce recueil. C’est bien le poète de la nature, car il n’a pas même appris à lire et à écrire. Tout son répertoire lyrique est dans sa tète, et son seul talent acquis est celui de jouer de la guzla. C’est en l’excitant à moitié que le traducteur de ce livre est parvenu à lui faire chanter et à fixer sur le papier quelques-unes de ses ballades; il lui en a même coûté quelque chose de plus, car Maglanovich ne se borne pas, comme nos trouvères, à recevoir les dons de ceux qui veulent entendre ses chants : il paraît qu’en quittant ses hôtes, il tient