"La Guzla" de Prosper Mérimée : étude d'histoire romantique (sa posvetom autora)

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CHAPITRE IX.

Goethe, celui-ci « se donna le plaisir de dévoiler ce qu’il savait parfaitement 1 ». Quelques années plus tard, un Allemand, qui traduisit les Œuvres de Mérimée, et en omettant toutefois la Guzla, assura à nouveau la même chose 2 . En 1875, Léo Joubert donne une nouvelle explication : « Goethe, quand il reçut la Guzla, ne devina pas tout d’abord de quelle main elle partait; il inclinait à regarder le recueil comme authentique. Ampère, alors à Weimar, et qui voyait tous les jours le grand poète allemand, se hâta de le détromper en lui révélant le nom du véritable auteur 3 . » Ampère séjourna à Weimar pendant les mois d'avril et mai 1827; or, la Guzla ne parut que fin juillet : l’assertion de Léo Joubert est donc inexacte. Mais elle n’en est pas moins intéressante : Ampère, qui savait que l’impression de la Guzla touchait à sa tin, parla beaucoup de Mérimée à Goethe pendant le grand dîner du 4 mai 1827 ; sut-il garder un silence complet sur la dernière production de son ami? On serait tenté de croire qu’il commit une indiscrétion, si nous n’avions la preuve du contraire ; nous en parlerons tout à l’heure. Mérimée, il est vrai, envoya un exemplaire à Weimar. « Remerciements pour l’article de Goethe que vous avez pris la peine de traduire pour moi, écrivait-il à son ami Stapfer. S’il faut vous dire la vérité, il m’a paru un peu plus lourd que les morceaux de critique du Globe, ce qui n’est pas peu dire. Je n’en suis pas moins très reconnaissant de ce souvenir... Ce qui diminue son mérite à deviner l’auteur de la Guzla, c’est que je lui en

1 Gustave Planche, Portraits littéraires, 1.1, pp. 207-208. 2 Taschenbibliothek klassischer Romane des Auslands : Prosper Mérimée’s Werke, ûbersetzt von Heinrich Elsner. Stuttgart, 1845, t. VII, pp. 250-251. 3 Revue de France, 31 juillet 1875, p. 42.