"La Guzla" de Prosper Mérimée : étude d'histoire romantique (sa posvetom autora)

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APPENDICE.

« couleur locale » était encore loin de songer aux principes qui le rendront plus tard célèbre. A en juger d’après le début, le style de’ cette Lamentation manque de « couleur » ; il est semi-classique, semi-ossianique (« wreath », « wild swans», « Vaga’s fair fountain »); il est évident que la pièce n’apporterait pas beaucoup à la gloire de Scott. Mais, si on comprend facilement que son auteur l’ait gardée en manuscrit, on se demande pourquoi le possesseur actuel de l’autographe croit devoir le tenir caché. Il faut ajouter que ce n’est pas la famille du poète qui en interdit la publication. Walter Scott ne fut pas le seul grand poète anglais qui connut l’existence de ce poème « morlaque ». Byron, qui voyagea tant en Orient 1 , paraît aussi n’avoir pas ignoré la Triste ballade ; c’est à elle qu’il pensa quand il fit allusion aux « chansons bosniaques » dans la, Fiancée d’

1 Dans le chant II de Childe Harold, il signalait déjà, dès 1809, l’lUyrie au futur auteur de la Guzla : From the dark barrière of that rugged clime, Ev’n to the centre of Illyria’s vales, Childe Harold passed o’er many a mount sublime, Through lands scarce noticed in historié taies. - The Bride of Abydos, canto 11, vers 701. Le commentateur de l’édition critique de Byron, M. E. H. Coleridge, a tort d’expliquer les « chansons bosniaques » par le recueil de Karadjitch. Le deuxième chant de la Fiancée d Abydos est de novembre 1813, tandis que Karadjitch ne commença ses publications qu’en 1814. Si Byron vraiment connaissait quelque poésie serbo-croate (la Bosnie est un pays où l’on parle cette langue), il ne pouvait la connaître que par Fortis ou par les traductions de Herder et de Goethe. Très probablement, il pensait au Jilaggesang de ce dernier, son « prince » auquel il dédiait ses poèmes et à qui il déclarait « faire les honneurs de vassal».