"La Guzla" de Prosper Mérimée : étude d'histoire romantique (sa posvetom autora)

LES ILLYRIENS AVANT « LA GUZLA ».

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greco-italiote était catholique fervente. « Placée, au début de la vie, dit son biographe 1 , sous ces deux influences religieuses contradictoires, elle subit un tiraillement moral dont l'impression demeura ineffaçable. Ses idées s’altérèrent au contact d’un monde frivole et sceptique, mais elle retint l’exaltation en perdant la foi. Rien ne put détruire en elle le germe de cette sensibilité profonde, qualité qu’elle tenait de sa mère, et qui donne, en grande partie, leur valeur à ses œuvres. « Justine était l’aînée de cinq enfants, trois filles et deux fils ; elle avait quatorze ans, quand une violente attaque dégoutté remontée lui enleva son père. Quoique celui-ci habitât l’ltalie depuis plusieurs années, il était resté sujet britannique, et sa famille dut se conformer aux prescriptions des lois anglaises. Lord Holland, l’un des grands seigneurs philosophes de cette époque, fut nommé tuteur de Justine et de ses frères et

1 Notice sur la vie et l’œuvre de Justine Wynne, par le baron Ernouf, dans le Bulletin du Bibliophile, 1858, p. 997 et suiv. (En citant cet article, nous l’abrégeons.) Outre cette curieuse Notice, nous avons consulté : l’introduction des Essays moral and sentimental (Londres, 1785) ; l’article cité de Charles Nodier ; Biographisches Lexikon dès Kaiserthums Oesterreich, von Dr. G. v. Wurzbach (art. « Rosenberg-Orsini » ) ; l’ouvrage cité de Franz Mildosich. Un érudit français, d’Ansse de Villoisôn, qui séjourna à Venise en 1782, parle souvent de la comtesse de Rosenberg, dans les très intéressantes lettres qu’il écrivit cette même année 1782 de la cour de Weimar à John Strange, ministre anglais à Venise. D’Ansse de Villoison était un des premiers Français qui aient connu Goethe personnellement, et M. Ch. Joret lui a récemment consacré trois articles dans la Revue d’histoire littéraire de la France (1895-1896) et dans la Revue germanique (1909). Les lettres dont nous parlons non seulement sont restées inédites, mais encore personne n’a songé à les étudier. Elles se trouvent au British Muséum, Eg. MSS. 2002, ff. 112-120, 127, 130, 138, 145, 155, 167, 181. Peut-être fût-ce cet ami de la comtesse de Rosenberg qui parla pour la première fois d’elle devant Goethe.