"La Guzla" de Prosper Mérimee : les origines du livre - ses sources sa fortune : étude d'histoire romantique : thèse pour le doctorat d'Université

LES ILLYRIENS AVANT « LA GUZLA ».

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se mirent à louer le « Klag-Gesang » morlaque 1 . Ces louanges s'adressaient à la lourde version qu’en avait donnée le poète Werthes ; mais une traduction plus ' réussie ne tarda pas à en être faite. Un grand poète en assuma la tâche. On ne sait pas exactement quand ni comment Die Sitten der Morlakken arrivèrent entre les mains de Goethe, et à quelle occasion ce dernier entreprit de mettre en vers le petit poème. Toutefois, l’auteur de Werther dut composer sa traduction en 1775 ou 1776, et cela non seulement en utilisant celle de Werthes 2 , mais aussi en recherchant dans le texte original, imprimé au recto., les particularités de la métrique serbo-croate, ce que Fortis et Werthes avaient négligé. (Le fait est brillamment démontré par Karl Bartsch 3 .) Devenu désormais le Klaggesang von der edlen Frauen des Asan Aga, ce morceau trouva, en 1778, une place dans le premier tome des Chansons populaires de Herder 4 . Comme nous l’avons

1 Frankfurter Gelehrten Anzeigen, des ler1 er et 5 mars 1776, p. 149. (Cité par M. Karl Geiger, dans VArchiv fur Lileraturgeschichte, t. XIII, Leipzig, 1885, p. 339.) 2 Die Sitten lier Morlacken, pp. 91, 93, 95, 97, 99. Le Klaggesang ne porte pas la signature de Werthes, mais on sait bien que la traduction était sienne. Cf. Dr. Theodor Herold, Friedrich August Clemens Werthes und die deutschen Zriny-Dramen, Münsler i. W., 1898, p. 35 et suiv. (Cité par M. Ôurcin, op. ait., p. 45.) Goethe avait fait la connaissance de Werthes une année avant la publication de cette traduction (1774). Cf. Allgemeine deutsche Biographie, t. XLII, p. 132, et Goethe-Jahrbuch, t. VII, p. 206 et suiv. Pour notre part, nous croyons que ce fut à cette occasion qu’il prit aussi connaissance de la traduction de Werthes. 3 Karl Bartsch, Goethe und das serbische Versmass, article publié dans la revue berlinoise Die Gegenwart, t. XXIV, 1883, n° 41, p. 229 et suiv. Volkslieder, Erster Tell, Leipzig, 1778, pp. 309-314. La traduction fut publiée anonymement; le nom de Goethe ne figure que dans les Goethes Schriflen, t. VIII, 1789, pp. 177-182. Sur cette traduction