La terreur à Paris

LES SALONS DE PARIS 935

font entrer en comptant le troupeau ; ils se trompent. Alors, avec une colère toujours croissante, ils ordonnaient de sortir : on sort, on rentre, on se trompe encore; et ce n'est quelquefois qu'après trois ou quatre épreuves que leur vue brouillée parvient enfin à s'assurer que le nombre est complet. »

Ces chiens étaient moins redoutables en somme que les guichetiers ! Témoinlechien nommé Ravage, qui, à la Conciergerie, était chargé, la nuit, de la garde de la cour du préau :

« Des prisonniers avaient, pour s'échapper, fait un trou (en argot un housard) : rien ne s’opposait plus à leur dessein, sinon la vigilance de Ravage et le bruit qu'il pouvait faire. Ravage se tait; mais le lendemain matin on s'aperçoit qu’on lui avait attaché à la queue un assignat de cent sous avec un petit billet où étaient écrits ces mots : « On peut corrompre Ravage avec un assignat de cent sous et un paquet de pieds de mouton. » Ravage, promenant et publiant{ainsi son infamie, fut un peu décontenancé par les attroupements qui se formèrent autour de lui, et les éclats de rire qui partaient de tous côtés. Il en fut quitte, dit-on, pour cette petite humiliation et quelques heures de cachot*. » !

À Sainte-Pélagie, il yavait aussi des chiens pour garder les prisonniers. Un prisonnier a dit : Ou si jamais je dors quelques moments, De vingt gros chiens, renforts de nos gendarmes, La voix bruyante et les longs hurlements h Dans tous mes sens réveillent les alarmes. (Mémoires sur les Prisons, t. II.)