Lazare Carnot d'après un témoin de sa vie et des documents nouveaux

63

La première est que les erreurs résultant de la substitution de quantités nouvelles aux premières puissent être rendues aussi petites qu'on le veut, et, c'est en cela que consistent les vrais infiniment petits. Ce ne sont pas, en effet, des éléments très petits ou plus petits que telle grandeur donnée, ce sont des éléments que l’on reste maître de rendre aussi petits qu'on le veut, sans qu'il y ait rien à changer aux quantités dont on veut établir les relations mathématiques. La seconde condition est que ces grandeurs auxiliaires (infiniment petites) disparaissent entièrement dans les équations finales, où on les néglige absolument, de sorte que ces équations ne renferment plus que des quantités déterminées. En effet, (tel est le raisonnement de Carnot), si ces équations finales étaient inexactes, les erreurs qu'elles sont censées renfermer seraient de grandeur déterminée, puisqu'il n’y a plus de trace de ces quantités infiniment petites ou indéterminées qu'on a supprimées ; et comme d'autre part, on a procédé de manière à ce que les équations ne soient jamais en erreur que de quantités aussi petites qu’on le veut, il faut évidemment qu'il n'y ait plus d'erreurs du tout.

En somme cette conception de Carnot est juste. Son opinion sur la nature des quantités dites infiniment petites est celle que tous les géomètres admettent aujourd'hui, et sa doctrine des équations imparfaites ou de la compensation des erreurs revient au fond à celle des limites actuellement en vogue. M. Haton de la Goupillière notamment l’a employée avec succès dans son cours de l'École nationale supérieure des Mines, à Paris. Elle a aussi des adeptes dans les plus célèbres Universités de l’Europe, comme celle de Louvain où la professe, par exemple, un mathématicien éminent,