Le drame serbe : octobre 1915 - mars 1916
SALONIQUE LA VILLE PRÉDESTINÉE 3
la France! » Tous les Saloniciens sont francophiles. Décidément, la Tour blanche fermera ses portes en beauté. Jamais clientèle plus bigarrée ne se disputa les hauts tabourets où l’on se perche pour aspirer avec le chalumeau des boissons multicolores aux noms pompeux.
« Nous sommes au carrefour des Balkans, m'a dit le mien ami. Tout ce que l'Orient recèle de races et de sous-races a envoyé ici, ce soir, quelqu'un de ses échantillons. Observez ces jeunes Juifs, à la table voisine. Ils sont aisément reconnaissables à leurs gestes trop polis et à leurs bottines trop fantaisistes, Les pères, pratiquants, ne fréquentent pas le cabaret. Les fils, qui se piquent de modernisme, y vont au grand désespoir de leurs mères restées femmes de tradition et qui portent encore le vieux costume sioniste avec le bonnet de dentelles et la robe à volants bordée d'hermine. Cet élément sympathise franchement avec les alliés. Tous les israélites d'ici parlent fran-