Le drame serbe : octobre 1915 - mars 1916

L'AUTRE RETRAITE 197

grillées, tout cet orientalisme qui a du pittoresque quand le soleil le dore, ne dégageait plus, par ce jour humide, qu’une senteur de boue et de fétidité. Il faisait triste, triste. Qui croirait que dans Salonique, ce même jour, un roi est venu ?

Salonique est blasée sur les coups de théâtre. Salonique a vu Abdul-Hamid prisonnier. Salonique a vu mourir Georges de Grèce. Salonique, sans émoi, a entendu sonner sur ses pavés les crosses des pairouilles françaises qui allaient, par la ville, décrochant les panneaux consulaires de deux empereurs, d’un tsar et d’un sultan. Salonique a vu bien des choses. Elle n’a jamais vu ce qu'en ce jour gris elle va voir.

Tard dans la nuit, un coup de téléphone a réveillé le préfet de la ville... Allo ! Levezvous ! Le Roi est là !... Le Roi ? Lequel ?... Est-ce qu’on peut demander lequel? Seul un Roi sans royaume peut arriver ainsi, sans qu'on ait pu planter un étendard, sans qu'on ait pu commander une escorte d’honneur ? Le Roi! Lui! On le croyait encore