Le drame serbe : octobre 1915 - mars 1916

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partout, sur le vaste monde, et pour la plus grande gloire de la grande Allemagne !... Mais ce n’était pas ces choses que le chef du Pressbureau lisait à haute voix. Ce qu'il lisait, c'était la quatrième page de la feuille, le seul texte quine fût ni faux ni monstrueux : les petites annonces, des petites annonces timides qui informaient le public que les leçons de piano de M" X... avaient recommencé à Belgrade, ou que M. Z..… avait perdu son chien et qu'il offrait une bonne récompense à qui rapporterait la bête...

Dans cet humble journal serbe, imprimé sous le contrôle autrichien, ces petites annonces timides étaient, malgré tout, pour les exilés, comme un écho infime, lointain, mais véridique du peu de vie qui se continuait, là-bas, dans la patrie perdue. Et debout, en cercle autour du lecteur, tous les ministres, tous les secrétaires d'État, tous les hauts fonctionnaires de la Serbie, écoutaient, recueillis, ces petites annonces timides ettouchantes — pieusement, comme s'ils eussent écouté une prière.