Le pacte de famine, histoire, légende : histoire du blé en France

TROISIÈME PARTIE. — APPENDICES 237

« La maison de la Pitié, qui est la principale, est celle où les pauvres sont receus, soit qu'ils y viennent volontairement, ou qu'ils y soient amenez; et y a pour cet effet proche de ladite maison deux lieux de depost, l'un pour les hommes, l’autre pour les femmes, oùils sont retenus jusques à ce que les directeurs qui sont commis voyent chaque jour s’ils doivent être renvoyez ou menez en quelqu'une des maisons.

« La partie de la maison appelée la grande Pitié est occupée par des filles, depuis sept ans jusques à seize et dix-huit, et par de vieilles femmes, dont la pluspart sont infirmes, et ne laissent pas de travailler et filer pendant leurs infirmitez:.….

« Dans la maison de Saint-Denis, dite de la Salpestrière, sont plusieurs femmes infirmes, et les plus jeunes enfans, depuis qu'ils sont sevrez jusques à sept ans, et depuis l’estè dernier, les mesnages mariez qui ontesté receus dans les bastimens faits des aumosnes de Monsieur le cardinal Mazarini, et d’autres personnes de condition et de piété, qui les ont voulu en la façon qu'ils sont.

« Dans la maison de Saint-Jean-Baptiste ou de Bicestre, sont les vieillards, les malades de maladies incurables, imbecilles et estropiez et les plus grands garcons et d’autres qui y sont retenus pour estre instruits des principes de la foy (dont ils sont absolument ignorans), pendant huict ou quinze.jours, puis employez, renvoyez ou chastiez suivant la déclaration (de 1656), quand ils sont trouvez par plusieurs fois retournans à la mendicité.

« Et dans la maison de la Savonnerie estoient jusqu'à ce jour les jeunes enfans depuis l’aage de sept ans jusqu’à l’aage de quinze ans, ausquels on apprenoit à lire et à escrire pour les mettreen condition ou aux ouvrages dont ils pouvoient estre capables (ils fabriquaient tapis de Turquie et de Perse), lesquels sont à présent transférez en la maison de Bicestre, pour laisser ladite maison de la Savonnerie libre pour employer aux manufactures que le roy y fait establir. »

Accoutumés depuis la donation de Louis XII à regarder Bicêtre comme leur propriété, les invalides n’accueillirent pas l'édit de 1656 sans murmures et menacèrent de reprendre à force ouverte l’asile d’où on les avait arrachés. Les directeurs!, troublés dansla jouissance de l’hospice, se plaignirent à leur tour. L'affaire fut portée au Parlement qui usa de rigueurs contre les soldats rebelles ; le 20 août

1. Il y avait 6 directeurs à Bicètre, 6 à la Salpétrière.