Le système continental et la Suisse 1803-1813

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hommes du gouvernement à tel point que, même devant la déroute de l’armée française, ils n’osèrent rien changer aux dispositions du système continental. Tandis qu’en Allemagne les peuples se soulevaient, effaçant jusqu'aux dernières traces d'institutions détestées, tandis que les denrées si longtemps prohibées pénétraient à la suite des armées alliées, les événements politiques n’apportaient pas en Suisse le soulagement impatiemment attendu.

Reinhard, le Landamman pour 1813, avait personnellement passé par trop d’expériences cruelles pour pouvoir se départr d’une grande prudence. Sa seule préoccupation fut d’éviter toute complication et tout danger de déplaire à l’'Empereur à la défaite définitive duquel il ne croyait pas encore. Son second, le commissaire Heer, suivait pas à pas cette politique réservée.

Plus la situation s’aggravait pour la France, plus la surveillance du ministre Talleyrand sur le Landamman devenait jalouse. Au moindre symptôme inquiétant, qui pût faire supposer un relâchement du système, il adressait à Berne des réclamations énergiques, auxquelles de nouvelles mesures donnaient aussitôt une docile satisfaction.

Le commerce suisse avait déjà tenté de mettre à profit l'éloignement de Napoléon. A la confirmation des désastres de Russie, la première stupeur passée, il saisit en hâte l’occasion de se dédommager. La contrebande des cotons filés anglais, étouffée en automne 1812, reparut de façon évidente, provoquant d’une part les plaintes de la légation française, de l’autre les exhortations réitérées du Landamman aux cantons !.

Au point de vue du blocus continental, la marche des armées coalisées séparait l'Allemagne en deux zones. Tandis que les ordonnances impériales étaient renversées dans toute la partie orientale et septentrionale, elles restaient en vigueur

! Circulaires du 14 janvier, 9 février et 9 mars 1813. Wartmann, p. 929.