Le système continental et la Suisse 1803-1813

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puissante région industrielle ; Mulhouse apportait à la France l’appoint de ses fabriques d’indienne et de ses teintureries 1. Cependant, excepté dans cette dernière ville, l’industrie

- cotonnière française est encore récente. Elle est bien loin de

Industrie de la soie.

suffire aux besoins du pays. Le prix élevé-de la main-d'œuvre, de moindre inconvénient pour les articles de luxe, paralyse la production des étoffes de qualité inférieure. N’étant point en mesure de fournir en quantité suffisante les tissus ordinaires à ses classes pauvres et les toiles blanches à ses fabriques d’indienne ?, la France doit continuer à faire appel à sa voisine qui travaille dans des conditions autrement favorables. Dans ces conditions, toute prohibition des produits suisses déterminera un renchérissement suivi d’une crise 3. Or, lintention de Bonaparte est précisément de risquer cette crise qui, dans sa pensée, après un malaise passager, produira deux résultats: d’une part, les lprogrès de l’industrie française qui heureusement protégée et développée, pourra désormais subvenir à la consommation indigène ; de l’autre, le retour du peuple à l'usage des tissus destinés par la politique du Premier Consul à remplacer les produits de coton sur le marché de l'Europe. Les étoffes de soie se substitueront tout naturellement aux mousselines et aux percales ; les tissus de lin regagneront sur les cotonnades la place perdue au dix-huitième siècle.

Comment ces deux dernières industries textiles vont-elle fournir à l'Empereur des armes pour sa lutte contre le coton?

Il est nécessaire ici de tracer encore un parallèle rapide entre la Suisse et la France.

Portée en Suisse dès la fin du dix-septième siècle à un

1 Beer, p. 3, 78-80.

2 Voir plus loin à ce sujet le Mémorial de Winterthur.

5 Les Gem. Schuw. Nachr. écrivaient : «L'usage des tissus de coton est tellement répandu en France que la prohibition forcerait les neuf dixièmes de ses habitants à revenir aux tissus plus chers de la laine, de la soie et du lin, ce qui provoquerait de grandes pertes. »

Gem. Schw. Nachr., 29 avril 1806.