Le système continental et la Suisse 1803-1813

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passagère à l'importation suisse, qui reprit activement sitôt passée l’époque agitée de la Terreur’. La période révolutionnaire fut même pour la fabrication des tissus fins un temps d’extraordinaire prospérité; d’une part, la guerre maritime avait mis fin en France à toute concurrence britannique dans cet article; de l’autre, à Lyon, la tourmente avait balayé avec les manufactures de soieries les fabriques de mousseline rivales de celles de Zurich et de Saint-Gall.

Mais la fin du dix-huitième siècle et le début du dixneuvième amenaient pour l’industrie suisse de graves complications. C'était d’abord l’occupation française en 1798, puis l'invasion autrichienne séparant le pays en deux territoires ennemis et provoquant, pendant le terrible été de 1799, l'interruption de tout commerce d'exportation et d'importation ; c’étaient enfin, succédant aux horreurs de la guerre étrangère, les agitations continuelles de lHelvétique. Les conséquences de cette époque désastreuse se firent vite sentir sur le marché européen; l'Angleterre s’avançait en maîtresse indiscutée sur le continent alors que l'industrie suisse luttait pour son existence ; la France, elle aussi, profitait du répit que lui laissait la paix d'Amiens; elle organisait en hâte ses nouvelles ressources et créait son industrie cotonnière. Avec l’aide du Premier Consul, grâce à l’impulsion d’un Oberkampf, elle peuplait de filatures mécaniques, de manufactures de toute espèce les provinces de l'Est, les bassins du Doubs, de la Saône et de la Meurthe. Le département du Haut-Rhin en particulier devenait une

1 Après son tarif de 1794, la République en avait promulgué en 1796 un nouveau à caractère nettement protectionniste. Malgré cela, 1796 fut une excellente année.

La Révolution vit aussi paraître en Suisse l’article des mouchoirs tricolores qui, vendus à 30-40 gulden la douzaine, eurent un vif succès en France. Cette spécialité rapporta de gros bénéfices et valut à elle seule de belles fortunes à quelques fabricants. Citons ici, entre autres exemples, celui

du Toggenbourgeois Abraham Bronner. Hungerbühler, p. 45-69.

Situation comparative des deux industries cotonnières française et suisse au début

du siècle.