Le système continental et la Suisse 1803-1813

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plateau, cette branche agricole, peu à peu négligée ou abandonnée au cours du dix-huitième siècle, ne suffisait plus aux besoins de l’industrie indigène. Ici encore, la Suisse était obligée de faire appel à l’étranger; c’est de Belgique et surtout de l’Alsace et de l'Allemagne méridionale qu’arrivaient annuellement chez elle, sans compter les filés de lin de Souabe, les plus fortes quantités de matières textiles,

Les produits de l’industrie du lin étaient absorbés en bonne partie par la consommation indigène. Les trafiquants qui se procuraient directement la marchandise chez les tisserands de la campagne et qui en général se chargeaient de la faire blanchir en faisaient aussi l’exportation.

Au dix-huitième siècle, les toiles suisses, plus particulièrementes connues sous le nom de « toiles d’Aarau », étaient recherchées en Europe pour leur finesse et leur solidité. Par les principales voies commerciales du continent, elles s’en allaient en France, en Allemagne et surtout dans le Midi, en Italie et en Espagne !.

$ 5. — La perte des marchés français.

Après avoir donné sur la situation des trois industries suisses au début de la Médiation ces explications qui étaient nécessäires, suivons maintenant leur destinée dans les diverses phases de la lutte que Napoléon poursuit contre elles.

Le premier objectif que devait se proposer Napoléon devait être tout naturellement d’écarter les produits manufacturés suisses des marchés de la France et des pays dont elle était devenue suzeraine. Il fallait agir promptement, autant pour donner à la jeune industrie française sa liberté d’action sur les débouchés indigènes que pour empêcher la Suisse, prête à reconquérir sa place en Europe, de se relever. C’est pourquoi, au lendemain du traité d’alliance en 1803, sans attendre davantage, Bonaparte porte aux tissus de coton un premier

1 Geiser, XXXIX.

Premières prohibitions des produits

manufacturés suisses.